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humaine, rappelle le mieux ses qualités, la gradation ininterrompue de ses sons, le timbre et la puissance de ses vibrations, l’agilité qu’elle est capable d’acquérir. Aussi, dès le commencement du XVIe siècle, des facteurs habiles s’étaient appliqués à perfectionner dans toutes ses parties la fabrication des violons. Leurs efforts persévérans aboutissaient à la création de ces merveilleux instrumens aujourd’hui si recherchés des amateurs et qui, suivant une ingénieuse remarque, rappellent, par leurs formes savamment combinées, la structure même de la poitrine humaine. On sait la réputation que s’étaient acquise à cet égard les luthiers de Crémone et les prix élevés qu’atteignent de nos jours leurs ouvrages quand ils se recommandent des noms fameux des Amati, de Stradivarius et des Guarneri. Grâce à ces artistes restés inimitables, toute une famille d’instrumens, la plus précieuse de toutes pour la symphonie, se trouvait désormais constituée d’une manière définitive. Avec le violon, c’étaient ses dérivés, l’alto, le violoncelle et la contrebasse, qui, à proportion de leur taille, présentent des diapasons plus élevés ou plus graves, admettent dans leur jeu une rapidité de mouvemens plus ou moins grande et conviennent par conséquent à l’expression d’idées musicales vives ou sérieuses, légères ou profondes. Les sonorités ainsi conquises, outre qu’elles fournissent une échelle assez étendue, offrent en même temps au compositeur une continuité et une homogénéité parfaites dans leur succession. Au lieu des lacunes et des discordances auxquelles il lui fallait autrefois se résigner, il peut désormais former comme une trame serrée et suivie, disposée pour recevoir la broderie des dessins mélodiques qui se fondent ou se superposent à son gré. Avec la différence de leurs timbres et de leurs allures, le groupe des instrumens à cordes est admirablement propre à devenir le fond même de l’orchestre, puisque soit pour le chant, soit pour l’accompagnement, il se prête à des combinaisons d’une richesse inépuisable. Aussi, par la suite, les compositeurs les plus illustres de la symphonie, renonçant volontairement aux ressources de l’orchestre complet, continueront à écrire pour les instrumens à cordes, groupés en nombre réduit, des œuvres qui, à raison de leur beauté propre, méritent d’être citées parmi leurs meilleures productions. Mais le perfectionnement des instrumens et les progrès des exécutans étaient les bénéfices les plus assurés que le Concerto devait rendre à l’art musical. Inventé par les solistes italiens, il était surtout destiné à manifester leur virtuosité. Après Giuseppe Torelli qui, vers la fin du XVIIe siècle, le perfectionnait sous le nom de Concerto grosso, en adoptant pour lui la coupe de l’ouverture française telle