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autour de la crypte sont tout à fait primitives, dignes du Xe siècle, apparence égyptienne, jambes raides, pas de poitrine, tête tournée de côté, maladroitement, avec une expression presque grotesque. Sur l’abside, plusieurs statues à barbares costumes ont du mouvement et semblent du XVe siècle.

Au dehors, charmant clocher formé par cinq étages octogones d’arcades, les trois premières rondes, les supérieures anguleuses ; c’est original et élégant ; par derrière, une abside de chapelles rondes qui montent les unes sur les autres comme à Ravenne et à Vérone. En somme, c’est une belle œuvre, fille directe de l’architecture romane, construite comme toutes les œuvres antiques et classiques, avec une idée très simple et bien développée. — Les nefs latérales, l’étage superposé, le clocher, les absides secondaires sont le bourgeonnement de l’idée architecturale antique. — Cette idée se développe en même temps que la société et le culte. Il faut un plus grand espace pour contenir toute cette foule nouvelle, esclaves, femmes, enfans ; un peuple entier. L’ancien temple était local et aristocratique.

M. B… nous montre plusieurs maisons anciennes bien conservées ; l’hôtel d’Assédat, bâti pour Marguerite de Valois ; l’hôtel des Cariatides, bâti par Bachelier sous François Ier ; d’autres encore, tous charmans. Ce style de la Renaissance, ces fenêtres encadrées de fruits, de fleurs, d’enfans nus, de satyres, de torses de femmes, ce goût pour la nature florissante, ce sentiment de l’ornementation riche et vivante, font un plaisir extrême. — Il n’y a eu d’artistes qu’en ce temps-là : nous sommes des bourgeois archéologues. Comme à côté de cela toutes nos constructions modernes, nos rues de Richelieu sont plates ! Comme le Louvre et la place de la Concorde ne semblent plus que des décorations d’opéra !

Ces maisons ont une terrasse sur le devant, avec des verdures, des vignes, des glycines pendantes ; les chevelures vertes montent parfois jusqu’au premier étage. Il y a des figures, des corps en mouvement au-dessus des portes, dans les coins, les façades sont peuplées ; rien de plat, aucune philosophie allégorique et pédante comme aujourd’hui. — Les gens de la Renaissance aimaient à voir des êtres bien portans et vivans ; ils se réjouissaient de la vie.

B… nous conduit chez lui et nous montre son musée. — Beaucoup de goût, bien des choses rares : collection des poids du Midi, de colliers et ornemens de l’époque gallo-romaine, d’ambres de toutes espèces, etc. Il aime passionnément l’art des XIIe et XIIIe siècles. Il nous avait fait voir au musée de superbes abbés