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leurs cliens continueront à leur confier leurs capitaux, non plus à des taux d’intérêt démesurés, mais à des conditions qui leur permettent de faire quelques bénéfices.

Ces catastrophes financières, suivant de si près les crises de la République Argentine et de l’Uruguay et venant se joindre aux déboires éprouvés par les capitalistes anglais dans plusieurs pays du sud de l’Europe, avaient fortement éprouvé le crédit des colonies australiennes, jusqu’alors si ferme que leurs derniers emprunts de 1888 à 1890 avaient été contractés en 3 1/2 0/0 aux environs et même au-dessus du pair : Victoria avait émis en 1899 à 102 3/4 un fonds 3 1/2 0/0 remboursable ; au pair en 1923 ; en juin 1893, en pleine crise, il tomba au-dessous de 87. Le 3 1/2 de la Nouvelle-Galles, émis en 1888 à 102 1/4 et remboursable en 1924, ne cotait plus que 92 au même moment. Celui de l’Australie du Sud, lancé en 1889 à 98 et remboursable en 1939, avait fléchi à 93 ; celui du Queensland, émis en 1890 à 96 3/4 venant à échéance en 1949, à 87 3/4. C’était le crédit de Victoria, le meilleur avant la crise, qui avait été le plus atteint. Depuis lors, ces titres se sont rapidement relevés : en 1894, le 3 1/2 0/0 néo-gallois était presque revenu au pair, et aujourd’hui les cours sont plus élevés que jamais : 106 1/2 pour Victoria, 110 pour la Nouvelle-Zélande, 111 pour l’Australie du Sud, 109 1/2 pour le Queensland ; voilà les cours des 3 1/2 0/0 des diverses colonies australiennes en juillet 1890 à la bourse de Londres. La Nouvelle-Zélande, dont les fonds n’avaient guère fléchi pendant la crise, voyait au même moment son 3 1/2 0/0 remboursable en 1939 coté à 109 et son 3 0/0 remboursable en 1943 à 103 ; de même la Nouvelle-Galles a pu émettre en 1890 un emprunt 3 0/0 à 98. Si l’on tient compte de ce que ces fonds sont remboursables à date fixe et de la prime à amortir, leurs cours sont donc aujourd’hui, malgré la crise de 1893, aussi élevés, sinon plus, que ceux des rentes françaises.

On le voit, les créanciers de l’Australie ont repris confiance vite et facilement. Peut-être même peut-on dire qu’il est un peu prématuré de capitaliser à 3 pour 100 les fonds publics des colonies. L’ensemble de leurs dettes atteint 5 300 millions de francs ; c’est le total le plus élevé du monde relativement à la population : la dette par tête d’habitant varie, en Australie, de 1 000 francs en Victoria, à 1 800 au Queensland ; elle est de 1 300 francs en moyenne, alors que le chiffre correspondant n’est que de 800 en France, et notre pays est cependant le plus endetté de l’Europe. Sans doute, les emprunts des colonies n’ont pas été contractés, comme beaucoup des nôtres, pour réparer les désastres d’une guerre et pourvoir