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ou cléricale, trente ans après sa première candidature contre Poinsot, Ampère et Cauchy.

La publicité des séances était très restreinte sous la Restauration, comme elle l’avait été sous l’empire et sous l’ancien régime. Quelques savans, — en principe ceux dont les travaux avaient été approuvés par une commission, — étaient admis à l’honneur d’écouter les discussions académiques. La faveur, aisée à obtenir, était rarement demandée. Le journal purement littéraire, le Globe, fondé en 1825, inaugura le compte rendu des séances auxquelles les gens du monde, jusque-là, étaient restés complètement étrangers. Pierre Leroux, l’un des fondateurs et gérant du Globe, l’a rappelé dans un article de l’Encyclopédie Nouvelle :


Nous eûmes l’idée de faire tomber ces barrières, d’intéresser la société aux travaux des savans, de mettre les savans en présence du public. Ce fut Bertrand qui exécuta ce projet (c’était mon père). Faut-il dire que nous eûmes d’abord à surmonter de grandes difficultés pour le réaliser, et que le célèbre Cuvier, entre autres, qui dominait en maître à l’Académie des sciences, nous opposa la plus vive résistance, et fît voter par l’Assemblée des lois draconiennes pour bannir des séances notre ami.


Arago, devenu secrétaire perpétuel, ouvrit les portes à deux battans, en réservant dans la salle des séances une banquette spéciale aux représentans de la Presse ; il alla même, après la mort de Cuvier, jusqu’à leur livrer après la séance, dans une salle éclairée et chauffée pour eux, tous les manuscrits, sans exception, qu’ils pouvaient commenter et copier avant qu’ils entrassent aux archives de l’Académie. Plus d’une fois, les plis cachetés confiés à la discrétion de l’Académie ont été, par négligence, confondus avec les autres pièces de la correspondance, et livrés aux journalistes, qui n’en ont jamais abusé.

Libri blâme ces innovations ; il a raison peut-être, mais jamais elles ne furent un moyen de défense, qui, nécessaire sous la Restauration, devenait inutile et nuisible sous un gouvernement meilleur.


Si dans les dernières années de la Restauration l’ascendant de M. Arago eut des avantages pour l’Académie, il devint nécessairement inutile, et même dangereux, dès que les besoins qui l’avaient créé eurent cessé de se faire sentir.


L’influence des opinions et des intérêts politiques sur les questions de science est une légende qui ne supporte pas l’examen. On ne lit pas sans étonnement dans le Journal des Débats du 2 janvier 1840 :


Nous ne sommes plus, Dieu merci ! au temps où, comme sous la