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domaine de l’éclairage, ne pouvant la remplacer, d’ailleurs, ni dans celui de la saponification, ni dans sa transformation en « huile d’olive », fallacieuse étiquette sous laquelle elle alimente les deux tiers au moins de la consommation bourgeoise. Une autre cause de l’avilissement de son prix réside dans l’accroissement de sa production. Le Dahomey, où le palmier à huile représente une richesse foncière parfaitement déterminée, évaluée, où chaque habitant possède, à proportion de sa fortune, un certain nombre de ces palmiers qu’il soigne et exploite ; la région des Rivières à Huile ; le protectorat du Niger, contribuent dans une large mesure à augmenter chaque année le chiffre de ponctions expédiés en Europe.

A la Côte d’Ivoire, au contraire, les palmiers se trouvent disséminés dans la forêt, réduits, par leur lutte avec les arbres voisins, à un développement insuffisant, enfin privés de la culture qu’une bonne exploitation exige. Aussi leur rendement s’en ressent-il. On assure cependant qu’il existe à la Côte de Krou quelques champs de palmiers à huile plantés par les indigènes et entretenus par eux. Malgré tout, la traite de l’huile de palme, après avoir rémunéré largement les premiers qui s’y adonnèrent, semble aujourd’hui appelée à péricliter à moins d’une petite révolution économique et industrielle que les progrès si rapides des sciences rendent toujours possible au moment où l’on s’y attend le moins.

Il n’en est pas de même du caoutchouc. Bien que notre colonie du golfe paraisse devoir céder le pas, quant à la production du précieux suc, à la Guinée française, il est certain que ses applications de plus en plus nombreuses dans le domaine industriel doivent provoquer, soit une réelle plus-value de la matière première, soit un développement considérable de la production. Celle-ci nous a paru, à la Côte d’Ivoire, susceptible d’un assez grand avenir. L’Indénié, l’Attié, certaines régions voisines du Tanoé, celle d’Elloubo, notamment, peuvent fournir beaucoup plus de caoutchouc qu’elles n’en produisent actuellement. Les indigènes donneront d’eux-mêmes une extension de plus en plus grande à cette industrie toute locale le jour où ils verront baisser d’une façon inquiétante pour eux le prix du krou d’huile de palme.

Comme cette dernière, l’ivoire est aujourd’hui moins en faveur qu’autrefois. Non sans doute pour les mêmes raisons, car sa valeur, loin de décroître, tend plutôt à s’élever. Mais l’ivoire lui-même se fait de jour en jour plus rare ; C’est sans doute un épisode curieux de la lutte sans merci de l’homme, noir ou blanc, contre la