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évangélique de Bade ; en haut, dans la hiérarchie, il est installé ; en bas, parmi le collège électoral des fidèles, il s’installe. En second lieu, une « géométrie politique » des plus savantes a dessiné de telle façon les circonscriptions du grand-duché, que sur 63 districts, 31 seulement conservent une majorité catholique. Ainsi, fatalement, le centre est en minorité dans la Chambre badoise, bien que les catholiques soient en majorité dans le grand-duché ; et les amateurs de sectionnemens élégans, respectueux d’ailleurs de la volonté populaire, trouveraient dans l’observation du pays de Bade une leçon et un régal. De la combinaison de ces deux caractères, vous dégagez le portrait du grand-duché : la confession de la minorité gouverne, et la confession de la majorité obéit ; quant à cette minorité, elle comprend un certain nombre de dévots, d’une foi exacte, un moindre nombre de dévots, d’une foi plus lâche et plus libérale, enfin un grand nombre d’indévots, d’une fois nulle ; ceux-ci, lorsqu’il y a des élections dans l’église évangélique, décident du succès des « libéraux » sur les « croyans ». Et, de même que le grand-duché, catholique aux deux tiers, est régi par le troisième tiers, de même, l’élite correctement pieuse de l’église évangélique est évincée par une coalition de « libéraux » et d’indifférens ; en fin de compte, à tous les étages, les majorités voient leur volonté annulée, et servent de marchepieds pour la tyrannie des minorités. De là résultent la prolongation du Kulturkampf, l’interdiction à l’église catholique d’ouvrir des établissemens d’instruction, l’effacement du caractère confessionnel de l’école. Or prenons garde d’exagérer en parlant du bien que la persécution fait aux religions ; si la rhétorique est unanime à le célébrer, l’histoire n’est pas unanime à le prouver. De la crise politique qu’il a dû subir, le catholicisme badois a plus pâti que bénéficié ; et il en pâtit toujours. Les statistiques, depuis cinquante ans, attestent un perpétuel recul de la majorité catholique en Bade : sur 1 000 habitans, il y avait, en 1846, 664 catholiques et 316 protestans ; en 1885, la proportion s’était abaissée à 627 catholiques ; elle sel ait ; élevée à 354 protestans. L’église romaine, au grand-duché, manque de prêtres ; pour fonder beaucoup d’œuvres sociales, l’haleine et le personnel lui ont fait défaut ; chaque année, à Carlsruhe, 300 enfans lui échappent, et plus encore à Mannheim. Originales sont ses revanches : Fribourg-en-Brisgau, grâce à la librairie Herder, est devenu le premier centre scientifique de l’Allemagne catholique ; et M. Werthmann, secrétaire de l’archevêché, est en train de centraliser, pour la première fois, le bilan de toutes les œuvres de charité catholique de l’empire. C’est d’ailleurs l’archidiocèse de Fribourg qui fournit le plus d’argent au Bonifaciusverein pour le