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Ainsi, pour la première Chambre, le droit d’élection appartient à la noblesse, ordre, classe fermée, ou caste ; aux universités, corporations fermées : à telle catégorie de membres de la noblesse et à telle catégorie de professeurs des universités ; et de même qu’eux seuls possèdent l’électoral, eux seuls encore ont l’éligibilité, avec quelques autres personnes, admises, en très petit nombre, au partage de ce dernier privilège. Pour la seconde Chambre, le suffrage universel, institution moderne, fonctionne suivant l’ancienne division du pays en villes et campagnes, circonscriptions urbaines opposées aux circonscriptions rurales. L’exclusion de la seconde Chambre, portée contre les nobles éligibles à la première, coupe en deux la représentation, et par-là même la population ; elle crée une Chambre seigneuriale et une Chambre populaire ; elle crée une noblesse et un peuple entre lesquels il n’y a que des séparations et pas un trait d’union.

Point de doute. Cette organisation repose bien sur les états, sur les Stände. La base en est bien la distinction entre nobles et non nobles, d’une part, et, d’autre part, entre nobles de divers titres. C’est bien une forme ancienne de représentation organique, et plutôt le système des ordres que le régime représentatif au sens moderne. — Et c’est, au point de vue d’où nous jugeons, un exemple topique de ce que ne peut ni ne doit être la représentation organique dans l’Etat moderne.

En Bavière comme à Bade, la première Chambre est aristocratique et la seconde, populaire.

On voit, en effet, dans la première Chambre, des princes du sang royal, des membres héréditaires et des membres de droit à raison d’une dignité, d’une fonction ou d’un titre, des membres nommés à vie par le prince à raison de leurs services, de leur naissance et de leur fortune ; mais on n’y voit pas de membres élus, même par et parmi la grande noblesse, constituée en ordre fermé. Le principe de l’élection, même restreint à la prérogative la plus étroite, y fait absolument défaut et le caractère ancien de la Chambre bavaroise des seigneurs s’accuse non seulement par cette absence de tout élément électif, mais, en outre, et davantage, par ce fait que le droit de siéger dans la première Chambre s’attache à la propriété noble, à la charge, à la chose plus qu’à la personne, est réel plus que personnel, n’est personnel que par exception, pour certaines hautes et puissantes personnes.

La Chambre des seigneurs, en Bavière, est donc éminemment aristocratique. Et la seconde Chambre y est populaire ; elle s’y recrute au suffrage universel, ou presque ; à un suffrage très général, puisqu’il suffit, pour y être électeur, de payer une