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à graines, le riz dans l’Extrême Orient, le maïs en Amérique, afin de trouver dans ces graines l’association de la matière azotée et de l’amidon qui donne » au grain de froment une si puissante valeur alimentaire qu’il forme la partie essentielle de la nourriture d’une grande partie des habitans du globe.

Il nous est facile de suivre la migration de la matière azotée, de l’acide phosphorique et de la potasse, des feuilles du bas aux feuilles supérieures, de celles-ci à l’extrémité de la tige et au grain ; le transport de ces principes a été très bien étudié il y a plus de trente ans par un agronome distingué, Isidore Pierre, professeur à la Faculté des sciences de Caen. On est moins bien renseigné sur la formation de l’amidon ; on ne le voit pas s’accumuler dans les feuilles du blé comme dans celles d’un grand nombre d’autres espèces ; on ne trouve pas non plus dans ces feuilles de réserves de matières sucrées. La formation de l’amidon est très tardive, elle n’a lieu que tout à fait pendant la dernière phase de la végétation ; aussi arrive-t-il que, d’une année à l’autre, les quantités d’amidon contenues dans le grain varient dans de très larges proportions.

L’été de 1888 a été pluvieux, la maturation du blé tardive, et tandis que la récolte en France n’a été que passable, elle a été superbe dans notre sol un peu sec de Grignon ; les meilleures parcelles de mon champ d’expériences m’ont donné, cette année-là, la valeur de 60 hectolitres à l’hectare ; le grain de blé bien constitué renfermait 12, 60 pour 100 de gluten et 77, 20 d’amidon. En 1889, au contraire, le mois de juillet a été brûlant, la maturation précipitée ; on a moissonné trois semaines plus tôt que l’année précédente ; le grain renfermait 15, 3 pour 100 de gluten, mais seulement 61, 9 d’amidon. Si on calcule la quantité de matières azotées contenues dans les deux récoltes, on les trouve à peu près semblables ; mais en 1889 la quantité d’amidon produite à l’hectare a été beaucoup moindre ; l’élaboration de ce principe qui a lieu tout à fait à la fin de la végétation, a été arrêtée par la dessiccation ; aussi la quantité de grain récoltée à l’hectare s’est-elle trouvée bien moindre qu’en 1888, puisqu’on n’a récolté en 1889, sur les meilleures parcelles, que la valeur de 43 hectolitres à l’hectare.

J’ai cité ces résultats parce qu’ils expliquent les différences du rendement qu’on obtient dans les diverses régions de notre pays : tandis que, dans le Nord, on récolte comme en Angleterre et en Belgique 25 à 30 quintaux de grains à l’hectare, on tombe à 8 ou 10 dans nos départemens méridionaux.

Le phénomène de transport, de migration des matières azotées des feuilles et des tiges au grain, la production tardive de