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fermée, la quantité de matière élaborée sera donc moins grande que si elle avait continué sa besogne, et comme la fermeture de ces petites usines est déterminée par leur dessiccation, on conçoit que, pendant les années sèches, la quantité de matière végétale formée soit restreinte, que les tiges soient courtes, qu’il y ait peu de paille.

Au moment où la dessiccation commence, la matière azotée, qui forme le protoplasme, la partie vivante de la cellule, se métamorphose, prend une forme de voyage qui lui permet de traverser les membranes et d’émigrer vers les feuilles nouvelles, entraînant avec elle son cortège habituel d’acide phosphorique et de potasse.

Ce transport de quelques-uns des matériaux élaborés, des feuilles du bas vers les feuilles supérieures, va se poursuivre pendant toute la durée de la végétation, il se continue au moment de la floraison, qui sans doute, par un mécanisme dont nous ignorons le fonctionnement, ne se produit que lorsque la quantité de principes élaborés est suffisante pour nourrir les graines qui vont apparaître.

Au milieu de juin, sous le climat de Paris, commence l’épiage ; en pressant légèrement entre les doigts la partie supérieure de la tige, à l’endroit où elle paraît un peu renflée, on rencontre une légère résistance, elle est due à l’épi qui est entièrement formé avant de surgir au dehors ; il se compose d’une tige : le rachis, qui porte les fleurs, formées de petites folioles vertes : les glumes, dont l’une se termine, dans certaines variétés, par un long appendice qui caractérise les blés barbus. Si, au moment où l’épi surgit au dehors de la tige, on entr’ouvre délicatement les glumes, on découvre à l’intérieur de la fleur les organes essentiels ; sur un petit mamelon verdâtre, rudiment du grain, se dressent deux petites aigrettes de plumes légèrement divergentes, ce sont les pistils, les organes femelles ; autour d’eux, fixés à l’extrémité de fins pédoncules, se trouvent les anthères, encore fermés ; ils contiennent le pollen, la poussière jaune fécondante ; au moment de sa maturation les anthères s’ouvrent, le pollen tombe sur les petites plumes des pistils, bien faites pour le retenir ; il y germe, envoie un long tube, le boyau pollinique, jusque dans l’ovule sur lequel sont fixés les pistils plumeux ; la fécondation a lieu, le grain est noué.

Toutes ces opérations délicates, si intéressantes à suivre, se font dans la fleur fermée. Quand les étamines, se glissant entre les glumelles, apparaissent au dehors, que, suivant l’expression vulgaire, le blé est en fleurs, en réalité tout est terminé ; aussi, lorsqu’on essaie de créer des hybrides, c’est-à-dire des variétés