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Etats-Unis. Il coûte aussi bon marché que les pendules ; les plus ordinaires, les plus appréciés ne coûtent pas beaucoup plus d’un franc pièce !

Le Japon fabrique aussi des parapluies de premier choix ; les fabricans d’Osaka sont nombreux, celui de Tokio est célèbre ; il a probablement imité et perfectionné les procédés de la réclame américaine. « SUZUKI, rue Tachibana », nul ne doit ignorer cette adresse en extrême Orient.

Parlerons-nous du papier ? Cela va sans dire, et non du papier japonais, mais bien du papier d’Angoulême, du papier anglais, et du papier pour tenture ! et des simili-tapisseries, et des cuirs « imitant les cuirs de Cordoue ! » et des malles, des « Gladstone bags »… et la verrerie, verrerie de Venise, de Bohême, et la céramique, la poterie, la faïence, la porcelaine, expédiée pour rien, en guise de lest et vendue pour rien dans nos magasins, et les chaussures, les courroies, les couvertures, les balances, les lampes ; et les bouchons, les couvertures, les mouchoirs, la lingerie, les boutons de métal, les broderies, les cigarettes rangées comme les allumettes dans des boîtes européennes ou américaines, et la parfumerie, le savon, les plumes, le lait… tout enfin, tout, jusqu’au ciment de Portland !

Tout cela n’arrive pas encore, sauf exception, en Europe, mais se vend de plus en plus sûr les marchés qui appartenaient à l’Europe, et dans les colonies européennes elles-mêmes, au détriment des produits métropolitains.

Donnons rapidement un aperçu de la situation qui est faite par exemple à la colonie anglaise de Singapour. Nous avons parlé de la place qu’y ont prise les charbons japonais : cela est frappant et il en est de même pour beaucoup d’autres produits. Singapour était en quelque sorte la porte anglaise de l’extrême Orient, c’est là que se ravitaillaient nombre de bâtimens européens et qu’ils échangeaient leur chargement : aujourd’hui cette porte est en train de passer aux mains du commerce japonais.

Rien ne permet mieux de se rendre compte de ce qu’ont perdu les Anglais dans leurs colonies par le fait de la concurrence locale ou japonaise que les chiffres suivans extraits d’un rapport de notre consul à Singapour daté de 1895.

De 100 000 dollars[1], les importations de parapluies anglais

  1. 1890 1891 1892 1893 1894
    dollars dollars dollars dollars dollars
    Angleterre 104 463 115 585 87 853 38 653 2 115
    France 16 289 52 610 35 795 62 115 46 599
    Japon 180 1 665 320 74 843 268 666