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porter sur toute la clientèle du port, en sorte que les marchandises transportées par le chemin de fer entre ce port et Lyon ou Paris, qui paient déjà l’intérêt d’abord de tous les capitaux dépensés sur ce chemin de fer, puis d’une bonne partie de ceux qu’ont absorbés les lignes affluentes, devraient encore, sous forme de droits de port, contribuer à la dépense du canal, autant que celles qui utiliseraient ce canal. Devrait-on s’étonner, ensuite, de voir une concurrence si favorisée entamer fortement le trafic du chemin de fer, au grand préjudice de l’État ?

D’un autre côté, le bail d’affermage, en vertu duquel la compagnie du chemin de fer du Midi a aujourd’hui le droit de maintenir les péages sur le canal du Midi, expire le 30 juin 1898. Il sera bien difficile, pour l’État, de ne pas procéder, à ce moment. au rachat du canal et à la suppression des péages qui y sont aujourd’hui perçus, car si peu rationnelle que soit l’exemption, du moment où elle est le droit commun des canaux en France, la région du Midi est assez fondée à en réclamer le bénéfice. Il en résultera, pour la garantie, une augmentation que le Comité consultatif des chemins de fer a évaluée à 3 ou 4 millions.

Il y a la des menaces sérieuses pour l’avenir financier. Si elles venaient à se réaliser, sans que les effets en fussent atténués par un développement rapide des affaires et de la prospérité publique, il serait difficile d’échapper à la nécessité de rétablir l’égalité entre les deux réseaux qui desservent les communications à grande distance, par l’institution de péages sur les voies navigables. Ces péages ne devraient pas atteindre les houilles, les minéraux, les amendement, qu’il serait désirable de voir transporter au prix de revient, même sur les chemins de fer ; mais ils devraient frapper les produits d’une valeur plus élevée de taxes, sinon égales. du moins comparables à la part que représente le péage dans les tarifs de chemin de fer. On rétablirait ainsi l’égalité entre les parties du territoire qui sont dépourvues de voies navigables, et celles qui en sont largement dotées. On ramènerait sur les chemins de fer le trafic qui, d’après les défenseurs les plus autorisés de la navigation, devrait toujours lui appartenir, celui des marchandises d’une valeur moyenne ou élevée, auxquelles il n’est pas juste d’offrir gratuitement des voies payées par les contribuables.

Une pareille modification de régime serait évidemment inacceptable, quelles que fussent les nécessités financières, si elle devait, dans une mesure quelconque, profiter aux actionnaires des compagnies. Le seul fait qu’en apparence elle serait prise au profit des concessionnaires la rendrait irréalisable. Si donc on y