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alors le chemin de fer du Cap, à une distance de 600 kilomètres. Le matériel même du chemin de fer qui longe le Witwatersrand, de part et d’autre de Johannesburg, et amène aux mines d’or le charbon de Bocksburg, a dû être apporté ainsi. Aujourd’hui la ville est pourvue de voies aussi nombreuses que faciles, et communique par chemin de fer avec cinq ports : Cape-Town, Port-Elizabeth, East-London, Durban ou Port-Natal, et Delagoa-Bay. Le séjour en est sain et le serait encore davantage si l’eau y était bonne et en quantité suffisante. Malheureusement il est difficile d’avoir de bonne eau en abondance sur les hauts plateaux du Transvaal, où la sécheresse est absolue pendant six mois, quelquefois pendant huit à neuf : en 1889, Johannesburg fut désertée par la plus grande partie de la population à la suite d’une de ces saisons exceptionnelles dont l’influence, combinée avec le manque de moyens de transport, avait amené les vivres à des prix de famine ; et peut-être en aurait-il été de même en 1895 s’il n’y avait eu des chemins de fer. Le climat est d’ailleurs peu agréable, balancé entre les influences contraires de l’altitude qui atteint 1 750 mètres, et de la latitude qui est de 26 degrés. Pendant la saison sèche les variations de température atteignent 25° à 30° dans une même journée, surtout en juillet et août où les gelées nocturnes ne sont pas rares ; le vent soulève la poussière en de tels tourbillons que d’un côté d’une rue on ne peut apercevoir l’autre. Pendant la saison humide, de novembre à mars, au contraire, des averses assez fréquentes, souvent prolongées et toujours torrentielles, changent les rues à peine pavées en lacs de boue.

Ce ne sont pas ces inconvéniens secondaires qui peuvent arrêter la foule des immigrans, attirée par l’appât de l’or. Il est difficile d’évaluer la population de Johannesburg : aucun renseignement statistique précis n’existe, et elle varie constamment. La réponse qu’on prête à un habitant de Chicago interrogé sur le chiffre de la population de la ville : « Je n’en sais rien : il y a huit jours que j’en suis parti », ne serait pas déplacée dans la bouche d’un habitant de Johannesburg. D’après des évaluations de décembre dernier, la population du Witwatersrand entier, de Randfontein à Modderfontein, serait de 160 000 personnes de toute race : mais un grand nombre sont disséminées sur les diverses mines ; sans doute l’étroite ligne de constructions est à peine interrompue tout le long de l’affleurement du filon, surtout dans la partie centrale où les mines sont petites et rapprochées, toutefois on ne peut comprendre dans l’agglomération de Johannesburg, outre la ville proprement dite, que les faubourgs s’étendant de la mine Robinson à l’ouest, jusqu’à Wolhuter ou tout au plus