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Ce n’est que dans la seconde moitié de l’ère secondaire que leurs écailles ont cessé d’être osseuses.

Il est intéressant de noter qu’on rencontre, dans les terrains primaires, des reptiles dont le ventre est protégé par un plastron d’écailles ganoïdes analogues à celles des poissons osseux. Leurs successeurs du Trias ont perdu ces écailles.

Les oiseaux et les mammifères, arrivés tardivement dans le monde, sont pour la plupart dépourvus d’enveloppe défensive. Comme ce sont des animaux à sang chaud, il leur faut des plumes ou des poils pour conserver leurs chaleur ; plus les pays qu’ils habitent sont froids, plus épaisse est leur couverture de plumes et de poils ; mais, sauf quelques édentés, aucun ne porte de cuirasse dure.

L’homme à son corps complètement nu. Pourquoi aurait-il une armure ? Tout nu, il a passé au milieu des mammouths, des grands lions ; il a bien su se défendre ; son génie est sa cuirasse.

La multiplication des êtres a été facilitée parce qu’à l’origine ils ont été moins attaqués. — Les anciens êtres ont été non seulement mieux défendus, mais encore ils ont été moins attaqués ; les carnivores n’étaient pas autrefois aussi nombreux que de nos jours.

Les polypes, les échinodermes, les brachiopodes, les trilobites, les mollusques bivalves n’ont pu être de grands destructeurs. Dans nos mers, il y a beaucoup de gastéropodes carnivores ; il n’en était pas ainsi à l’époque primaire. Les genres caractéristiques de cette époque sont des herbivores que leur bouche entière, sans échancrure ni siphon, a fait nommer holostomes. Les siphonostomes ont été très rares dans le Primaire ; ils se sont multipliés plus tard. La plupart sont des carnivores. Il en est qui, avec leur trompe armée de dents, font dans le test des mollusques des trous ronds par lesquels ils sucent leur chair ; ces traces se voient souvent sur les coquilles tertiaires ; on n’en observe pas sur les coquilles primaires. Il en est d’autres qui sont dans le monde des mollusques ce que sont les vipères dans le monde des reptiles ; ils ont une glande chargée de sécréter du venin avec lequel ils empoisonnent leur proie. Ces genres venimeux, très répandus dans les terrains tertiaires et les mers actuelles, ne se trouvent pas dans les couches anciennes.

Les céphalopodes, qui aujourd’hui ont des becs et des bras garnis de griffes ou de cupules formant ventouses, sont de redoutables destructeurs. Ils n’étaient pas ainsi armés autrefois ; on n’a pas encore découvert des bras avec griffes au-dessous du