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par un écrivain ami du progrès, qui considérait d’ailleurs l’utilisation du pigeon comme un procédé quelque peu arriéré. Nous allons examiner si, dans notre réseau postal, télégraphique et téléphonique, il n’existe pas de lacune que l’emploi du pigeon messager permette de combler. Prenons deux correspondans habitant l’un Paris, l’autre Bordeaux : ils ont manifestement intérêt à se servir pour leurs relations du télégraphe ou de la poste. Une dépêche expédiée par l’un d’eux parviendra au destinataire en moyenne trois heures après avoir été déposée au bureau de départ. La situation n’est plus la même si nous envisageons le cas de deux correspondans habitant la campagne et résidant seulement à 20 kilomètres l’un de l’autre. La dépêche et souvent la lettre mettront le même temps à franchir ces 20 kilomètres que s’il s’agissait de faire le trajet de Paris à Bordeaux, tandis que le pigeon mettra de 15 à 20 minutes pour faire ces mêmes 20 kilomètres.

Toutes les fois qu’il s’agira de relier des correspondans habitant à moins de 100 kilomètres les uns des autres, la poste aérienne sera le plus rapide et le plus commode des modes de correspondance, surtout si l’on fait usage du voyage aller et retour. Voici comment on pourrait procéder à l’organisation de ce service, qui, une fois créé, fonctionnera en quelque sorte automatiquement. Supposons qu’un château possédant des pigeons voyageurs entretienne des relations de voisinage avec quatre correspondans. Il sera très facile d’affecter par exemple trois animaux au service postal aller et retour avec chaque destination. Le dressage est très simple ; enfin on n’astreint pas son correspondant à posséder un colombier ; il suffit qu’il installe chez lui une grande cage dont l’entrée soit munie de cliquettes, et dans laquelle les pigeons trouveront chaque jour aux heures convenues quelques graines à manger.

S’agit-il des relations du même château avec la ville voisine : le service est encore plus simple. Il existe dans toutes les villes des colombiers de pigeons voyageurs, auxquels le château peut, moyennant une faible redevance, emprunter un certain nombre de messagers. Les pigeons internés au château seront mis en liberté au fur et à mesure des besoins et rentreront à leur colombier porteurs de dépêches : celles-ci seront remises à destination par les soins du propriétaire des pigeons.

Le château peut lui-même interner un certain nombre de ses pigeons chez les personnes avec lesquelles il entretient des relations intermittentes.

Il est encore une circonstance, où le pigeon rendra des