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imprimé à Rome en 1629, par Branca, ingénieur et architecte de la Santa Casa di Loreta. Dans ce moulin, la vapeur d’eau, chassée par un orifice, communique l’impulsion à une roue dentée et, par suite de divers engrenages, aux deux pilons chargés de broyer les substances dont se compose la poudre de guerre. Dans un autre appareil similaire, c’est un courant d’air chaud qui donne l’impulsion. Depuis deux siècles et plus cette question des machines à poudre préoccupait beaucoup les ingénieurs, en raison de l’importance toujours croissante de l’artillerie.

Disons en passant que l’on constate ici la transformation d’un mouvement rotatoire en un mouvement alternatif, et par conséquent la possibilité de réaliser le changement inverse. Cette transformation est donc connue depuis longtemps. On la trouve, d’ailleurs, également dans la figure d’un moulin à poudre, dessiné dans le manuscrit de Munich, écrit vers 1430, manuscrit dont j’ai déjà parlé, et l’on pourrait sans doute remonter plus haut.

Quoi qu’il en soit de ce problème, dont la solution a été attribuée à tort aux inventeurs des machines à vapeur, on voit que l’action motrice de la vapeur d’eau, mise en œuvre dans le moulin à poudre cité plus haut, s’exerçait directement et à la façon du vent dans les moulins ordinaires. Jusqu’ici nous sommes toujours dans le même ordre d’idées qu’avec l’éolipyle.

En tous cas, la date de publication de l’ouvrage de Branca (1629) est postérieure de quinze ans à celle du livre de Salomon de Caus. La même remarque s’applique à une petite fontaine jaillissante de Kircher, jeu de physique analogue à la fontaine de Héron, mais fondé sur l’impulsion de la vapeur d’eau. Kircher, né en 1602, n’avait que douze ans lors de la publication de l’ingénieur français, et l’impression du Museum kircherianum eut lieu seulement en 1719.

L’évêque anglais Wilkins, né en 1614, l’un des fondateurs de la Société Royale, dans un ouvrage publié en 1648, c’est-à-dire postérieur de trente-quatre ans à celui de Salomon de Caus, a traité également des éolipyles et de l’application du courant d’air projeté par leur étroit orifice, pour activer ou concentrer la chaleur dans la fonte du verre et des métaux, ainsi que pour faire marcher la broche à rôtir. Ce sont toujours là des variantes de l’éolipyle ; elles montrent que son rôle n’est pas négligeable dans la suite historique de nos inventions.

Mais une connaissance plus claire de la force élastique de la vapeur et des effets directs développés par sa pression, même sans écoulement, avait déjà été signalée antérieurement aux publications précédentes, dans un ouvrage de Salomon de Caus,