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d’Angers; il fut reçu médecin en 1669. On ne sait s’il exerça cet art; mais deux ans après, en 1671, Huygens, qu’il avait connu à Angers, l’appela à Paris, pour l’aider dans les expériences qu’il poursuivait au Louvre, dans les bâti mens de la Bibliothèque du roi. Papin put se livrer, sous cette haute direction, à son goût pour la physique et la mécanique. Les notions nouvelles relatives au vide, qui résultaient des découvertes de Torricelli et des expériences de Pascal, ainsi que les machines à faire le vide, récemment inventées par Otto de Guericke, occupaient alors tous les esprits, celui d’Huygens en particulier ; ce fut là que Papin puisa les notions théoriques et acquit les connaissances pratiques, qu’il mit en œuvre plus tard dans ses inventions. Ce fut aussi à ce moment qu’il se trouva en relation avec Leibnitz, résidant à Paris (1672-1676) comme précepteur du fils du baron de Bornebourg et contracta avec lui une amitié que Leibnitz ne cessa de manifester par ses services.

Après avoir publié en 1674 un premier mémoire sur le vide, consacré en partie à des découvertes de physique pure et en partie à la conservation des fruits, Papin abandonne sa position à Paris pour aller chercher fortune en Angleterre. Peut-être sa qualité de protestant lui fermait-elle dès lors en France l’accès à des situations plus hautes ; cependant il ne fait aucune allusion à une semblable circonstance. Il quitta donc la France, bien avant la révocation de l’Edit de Nantes; non à la suite, comme l’ont prétendu quelques-uns de ses biographes.

Lorsqu’il passa en Angleterre, Huygens l’y recommanda. Boyle, à son tour, le prit comme aide et collaborateur dans son laboratoire (1676-1679) ; il le fit nommer, en 1680, titulaire de la Société Royale, dont il était l’un des fondateurs. En 1681, Papin inventa son digesteur, son œuvre la plus accomplie : la destination en était essentiellement pratique; j’en ai parlé plus haut.

Cependant, au bout de six ans de séjour, au lieu de poursuivre à Londres le lent développement d’une carrière scientifique qui s’annonçait avec quelque éclat, Papin se laisse entraîner vers une nouvelle aventure. Sarotti, chargé d’affaires du Sénat de Venise à la cour d’Angleterre, au moment de retourner dans sa patrie, voulut y fonder ce qu’on appelait alors une Académie, c’est-à-dire une réunion de savans et d’artistes, patronnés et pensionnés par lui. Papin accepta ses offres décevantes; et il abandonna, pour le suivre, son titre de membre de la Société Royale, tenu à résidence. Après être descendu à Anvers, il fit à Paris, en 1682, une courte visite, la dernière de sa vie, et il alla passer à Venise deux années, qui lui furent de peu d’utilité.

En 1684, Sarotti étant renvoyé en Angleterre par le Sénat,