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température basse ; aussitôt au contraire que la pluie arrive, que le temps devient plus doux, la graine en Ire eu évolution, elle absorbe de l’eau, se gonfle, et les principes contenus dans les cotylédons, les réserves restées jusque-là inertes et inutiles, commencent leur métamorphose. Au repos, ces réserves sont insolubles dans l’eau, or pour être assimilées, utilisées par l’embryon, il faut qu’elles deviennent solubles, qu’elles prennent une forme telle qu’elles traversent les parois des cellules, qu’elles se diffusent, qu’elles acquièrent, suivant la jolie expression des physiologistes allemands, « une forme de voyage. »

Si on examine au microscope une coupe d’une graine amylacée en germination et qu’on ait, ce qui est très facile, une image assez amplifiée pour distinguer les grains d’amidon, on des voit diminués, rongés, digérés. Ils se dissolvent sous l’influence d’un ferment soluble, la diastase, qui prend naissance dès que sont réunies les conditions extérieures nécessaires à la germination, c’est-à-dire de l’humidité, une température de 10° à 15°, et enfin de l’oxygène qui pénètre les tissus, les brûle partiellement et favorise, par la chaleur que dégage cette combustion, l’ensemble des métamorphoses.

Toutes ces transformations se produisent dans les tubercules de pomme de terre ; leur évolution est même bien plus facile que celle des graines : au lieu des 10 centièmes d’humidité que renferment habituellement les graines et qui sont insuffisans pour que la germination commence, on en trouve dans les tubercules 70 centièmes ; aussi voit-on au printemps, dès que la température s’élève, les tubercules émettre des germes. — Ceux qui apparaissent ainsi dans les caves ou les silos, à l’abri de la lumière, présentent un aspect très particulier. Tandis qu’un tubercule planté dans le sol forme des radicelles, puis une tige courte qui se couvre immédiatement de feuilles, que ce sont ces feuilles qu’on aperçoit tout d’abord quand on visite une plantation récente, la pomme de terre qui germe en silos produit, autour du bourgeon qui commence son évolution un court verticelle de racines, puis une tige blanche, grêle, qui porte, très espacées les unes des autres, des feuilles rudimentaires jaunâtres ; au lieu de s’épanouir, celles-ci restent fixées le long de la tige.

Privées de lumière, les feuilles sont sans utilité : elles ne peuvent travailler à décomposer de l’acide carbonique, elles ne pourront fonctionner tant qu’elles n’auront pas atteint un espace éclairé, et dès lors les réserves du tubercule s’emploient à allonger les tiges qui peuvent conduire les feuilles à la lumière. Dans bien d’autres circonstances encore, on voit les végétaux utiliser les