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un recteur de l’Université de Paris avait le pressentiment des services que pourrait rendre une institution de ce genre. Au XVIIIe, l’idée qui avait été ainsi déjà entrevue commença de se réaliser quand, après l’expulsion de l’ordre des Jésuites, les parlemens travaillèrent à mettre la main, au nom de l’Etat, sur la direction de l’enseignement secondaire. A part le nom, qui n’avait pas encore été prononcé en France, ce devait être une Ecole normale au petit pied que ces douze jeunes gens choisis, par voie d’examen, parmi les maîtres ès arts, qui recevraient le vivre et le couvert au collège Louis-le-Grand, devenu à ce moment le chef-lieu de l’Université. Comme nos élèves, ces boursiers avaient trois ans pour se préparer au concours qui couronnerait leurs études et leur ouvrirait l’accès des chaires les plus estimées ; le 3 mai 1766, des lettres patentes avaient établi les trois agrégations de grammaire, d’histoire et de philosophie. M. Dupuy a retrouvé les noms de deux maîtres ès arts qui, en vertu du règlement promulgué le 4 septembre 1770, ont été admis, en 1776, à profiter de ces avantages ; c’est, pour parler la langue familière de notre maison, les plus anciens archicubes qui aient qualité pour figurer, hors rang, en tête de nos listes.

Par le but qu’il propose à l’ambition des élus et par le régime auquel il les soumet, ce premier pensionnat d’élèves-maîtres que l’Université de Paris établit à Louis-le-Grand ne diffère guère de celui que l’Empire devait, quarante ans plus tard, logera nouveau dans les mêmes bâtimens scolaires ; peut-être y aurait-il donc lieu de chercher là, plutôt que dans l’œuvre de Fontanes, les vraies origines de notre studieux internat ; mais, d’autre part, une école destinée à former les instructeurs de la jeunesse ne nous paraît aujourd’hui pouvoir remplir utilement sa mission que si l’enseignement y éveille les plus hautes curiosités, que si les esprits y sont sans cesse sollicités de puiser la science à ses sources les plus pures, dans les leçons et les exemples de maîtres qui, par leurs travaux, la fassent avancer sous les yeux et avec le concours de leurs élèves. Cette école, nous ne la concevons même plus sans ce ferment de vie mêlé à toute la masse, sans ce mouvement des intelligences qui, mises en possession des méthodes de recherche, s’élancent avec une ardeur ingénue dans tous les chemins au terme desquels elles entrevoient la découverte de la vérité.

L’institution eût-elle fonctionné plus régulièrement qu’elle ne l’a jamais fait, il n’y avait rien de pareil à attendre du groupe des boursiers de la vieille Université. On sait jusqu’où celle-ci avait laissé tomber le niveau des études dans les années qui précédèrent la Révolution. Les sciences physiques et mathématiques