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gymnastique. En outre, pour faire le trait d’union entre les deux institutions, on fonda une guilde, ou association, ouverte à toute personne en relation quelconque avec elles et qui réunit trois fois par mois riches et pauvres, lettrés et étudians ouvriers, pour la discussion amicale des questions sociales.

Mme Ward et ses amis ont soigneusement évité ce qui pourrait donner à leur œuvre un caractère sectaire ou confessionnel. Quiconque veut devenir « membre résidant » à University Hall n’a qu’à exprimer sa sympathie pour le but de l’institution ; on ne lui demande aucune autre profession de foi politique et religieuse. Ce n’est pas que la fondation n’ait un cachet religieux ; mais aux yeux de Mme Ward et de ses amis, la religion d’un homme consiste moins dans la profession de certains dogmes que dans la conduite de la vie. « Nous pensons, disaient les résidans dans un de leurs appels, que beaucoup de modifications dans les conditions d’existence des ouvriers sont nécessaires et même imminentes. Mais nous pensons aussi que les hommes ne sauraient faire de ce monde un séjour plus heureux, sans opérer d’abord un changement en eux-mêmes et dans leurs sentimens les uns vis-à-vis des autres. C’est pourquoi, avec la même sympathie, mais avec des expériences diverses, nous nous réunissons pour discuter les questions sociales et religieuses, dans l’espoir qu’en apprenant à nous mieux connaître, nous éveillerons en nous le sentiment de solidarité. »

Depuis cinq ans, la mission populaire entreprise par Mme Ward s’est maintenue et développée dans ces deux directions : conférences sur des sujets d’histoire et de littérature bibliques, de science naturelle et d’économie politique à Gordon Square, et réunions dites « sociales » à Marchmont Hall. Quand la période de trois ans, pour laquelle on avait garanti les souscriptions, eut expiré, elle entreprit, en plein hiver, une campagne de discours à Manchester, Liverpool, Leeds, qui eut un plein succès. Non moins charmés par sa parole qu’ils l’avaient été par ses romans, ses auditeurs lui assurèrent pour une deuxième série triennale une somme de 800 £ par an.

Mais la salle de Marchmont Street est devenue trop étroite ; il s’agit de construire un édifice analogue à Toynbee Hall au nord de Londres, dans le district de Somerstown, qui est habité par une population ouvrière aussi agglomérée et dépourvue de ressources que celle de l’East-End. Du fond de l’Italie, notre romancière n’hésita pas à s’adresser à un philanthrope, M. Passmore Edwards, et celui-ci, le 30 mai 1894, se déclara prêt à faire la donation nécessaire, soit 1 000 £, à condition qu’on trouvât un emplacement