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que la surveillance de l’établissement est confiée au chancelier de l’Empire assisté de trois autres curateurs, et sa gestion à un directoire nommé par le gouvernement. Les employés à tous les degrés sont considérés comme des fonctionnaires plutôt que comme des serviteurs de la Banque, dont ils n’ont pas le droit de posséder une seule action. En dehors de l’assemblée générale, les actionnaires n’exercent d’influence sur la conduite des affaires que par l’intermédiaire d’une commission centrale nommée par eux ; cette commission assiste la direction dans ses travaux quotidiens et donne son opinion dans un certain nombre de cas prévus par les statuts. L’Etat a droit à la moitié de la réserve et prélève une part notable des bénéfices réglée comme suit : Aussitôt que les actionnaires ont reçu 3 1/2 pour 100 de leur capital, l’Empire partage l’excédent jusqu’à, ce que les actionnaires aient touché 6 pour 100 ; au-delà de 6 pour 100, les trois quarts des bénéfices lui appartiennent. Il a reçu ainsi plus de 30 millions de reichsmarks depuis 1870 ; en 1892, sa part a été de 4 342 000 marks, alors que les actionnaires n’en ont reçu que 3 457 000.

Il faut reconnaître que l’Empire allemand n’a pas jusqu’ici fait un mauvais usage des pouvoirs si considérables que la loi lui confère dans l’administration de la Banque ; il en a respecté les statuts et n’en a pas mis le crédit à contribution pour ses propres besoins. Il est vrai qu’il ne s’est pas encore écoulé vingt ans depuis la fondation de l’établissement : cette période de paix extérieure n’a pas donné au jeune Empire l’occasion de montrer s’il échapperait à la nécessité, où tous les États européens se sont trouvés acculés à un moment donné de leur histoire, de recourir à l’aide de leurs banques d’émission, fondées parfois uniquement pour venir au secours des finances publiques. L’actif est vierge de toute créance sur le trésor. Le billet n’a pas cours légal : la loi organique a pris soin d’exprimer « qu’il n’existe pas d’obligation d’accepter des billets de banque pour les paiemens qui sont légalement exigibles en espèces, et qu’une telle obligation ne peut pas non plus être établie par la législation d’un pays à l’égard des caisses de l’Etat. »

Aussi longtemps que l’Allemagne respectera les barrières qu’elle s’est opposées à elle-même, la Reichsbank continuera à jouir du crédit qu’elle a aujourd’hui, et son billet, que nul n’est tenu d’accepter, à circuler à l’égal des espèces. Elle rend des services considérables au pays par les comptes de virement, grâce auxquels les affaires se règlent sans frais entre la plupart des villes. Elle fournit un appoint qui n’est pas sans importance au budget des recettes par le partage des bénéfices ; le prélèvement de l’Empire, augmenté dès 1890, lors du premier