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de types reproduisant fidèlement les types originaux. Le résultat final, à travers les siècles, est la répartition presque égale des couleurs entre les diverses formes de crânes. M. Collignon l’a constaté pour les conscrits du département des Côtes-du-Nord ; M. Ammon, pour ceux du duché de Bade. Les yeux bleus et les cheveux blonds des anciens Germains subsistent chez les Badois, tandis que la dolichocéphalie a presque disparu. Une race a ce que M. Collignon appelle des caractères forts ou résistans, qu’elle tend à imposer presque indéfiniment à ses métis, même éloignés (tels les yeux bleus pour la race septentrionale), et des caractères faibles, persistans, qui se laissent facilement éliminer dans les croisemens. Un caractère très fréquemment rencontré peut donc cependant n’être qu’adventice ou surajouté ; les yeux bleus ne prouvent pas que la tête soit dolichoïde. La couleur peut subsister lorsque la forme du crâne change. De même, il est probable que les qualités de structure cérébrale, auxquelles sont liées les qualités psychiques héréditaires, tendent, par l’effet des nombreux croisemens, à se dissocier peu à peu d’avec la longueur du crâne et à se répartir entre les diverses formes de crânes, comme celles-ci entre les diverses couleurs d’yeux et de cheveux. Tout ce qu’on a pu dire de plus plausible sur les croisemens, c’est qu’un père de beaucoup d’intelligence sans persévérance, par exemple, et une mère très persévérante avec peu d’intelligence, auront chance d’avoir des enfans d’un des quatre types suivans : 1° reproduction du père, 2° reproduction de la mère, 3° intelligence et persévérance réunies, ce qui assurera le succès (si qua fata aspera…), 4° peu d’intelligence et peu de persévérance, type destiné à l’insuccès et à l’élimination finale.

Qu’il y ait dans nos sociétés contemporaines beaucoup d’hommes déséquilibrés, nous ne le nions pas. Y en a-t-il plus qu’autrefois ? Nous l’ignorons. Ce qui est certain, c’est que les causes physiques de déséquilibration sont beaucoup moins les croisemens de Celtes et de Germains que l’extension progressive de l’alcoolisme et d’autres maladies, l’abus du tabac, le séjour des villes, le manque d’une bonne hygiène, la vie sédentaire, le surmenage, etc. ; mais les principales causes sont morales : lutte et contradiction des idées, des sentimens, des croyances religieuses et irréligieuses, des théories politiques et sociales, licence de la presse, pornographie, excitations de toutes sortes, etc. L’indice crânien est étranger à tous ces maux.

Comme remède, cependant, on nous propose, en s’inspirant des théories de M. Galton et de M. de Candolle, une « alliance aryenne ». Les Aryens et leurs métis peu éloignés se chiffrent, nous dit-on, par une trentaine de millions, tant aux États-Unis