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restaurans et les cafés, bref pour le monde entier, pour la satisfaction de tous ses besoins et l’agrément de toutes ses journées. Cinquante mille francs étaient affectés à indemniser 18 concurrens de leurs débours et de leur temps. Leur talent n’entrait en ligne de compte que pour la gloire. Le chiffre était maigre pour le grand et difficile effort qu’on leur demandait. Mais telle est chez nos artistes le détachement des choses de la terre qu’il s’en trouva 670 qui se firent inscrire. Il est vrai qu’au dernier jour du concours, il ne s’est plus trouvé que 108 exposans effectifs et 4 mis hors concours pour causes diverses. Ces 108 exposans ont, en tenant compte de leurs variantes, fourni 110 projets. Je n’étonnerai personne en disant que pas un ne réalisait toutes les conditions d’un programme beaucoup trop touffu pour qu’il pût être étudié en quatre mois. La commission supérieure, les commissions particulières, le commissaire général, M. Picard, entouré d’un état-major d’hommes distingués, judicieusement choisis, toutes forces intellectuelles et pratiques réunies, avaient travaillé pendant plus de deux ans pour préparer les élémens de ce concours ; — et, pour tracer les plans d’une si vaste opération en y ajoutant des devis sommaires, on n’accordait aux artistes que cent vingt jours ! C’était trop peu ; malgré cela il est sorti de cette élaboration pressée et désintéressée un ensemble considérable de travail, d’idées, de combinaisons ingénieuses qui ont fait de ce concours le plus remarquable que l’on ait jamais vu.

Le jury qui devait juger les projets était composé de 31 membres : le ministre du commerce, le commissaire général de l’exposition, le directeur général de l’exploitation, le directeur général adjoint, le directeur des services de la voirie, des parcs et jardins, des eaux et de l’éclairage ; le directeur des services d’architecture M. Bouvard, le directeur des finances, le secrétaire général de l’Exposition, le directeur des Beaux-Arts, le directeur des bâtimens civils ; le directeur de l’agriculture, dix membres nommés par le ministre, parmi eux des sénateurs, des députés connus par leur goût, et trois architectes renommés ; enfin dix membres élus par les concurrens. Il se trouva que ces dix membres étaient tous architectes et professeurs à l’Ecole des Beaux-Arts. L’architecture était donc largement représentée dans le jury ainsi composé ; on peut affirmer qu’elle y a joué un rôle prépondérant. Si ses décisions ont pu être en quelque point entachées d’erreur, ce n’était certes pas faute de lumières ni encore moins faute d’indépendance et de conscience. Peut-être ont-elles, au contraire, subi trop vivement l’influence du goût dominant chez nos architectes modernes. Le jury est allé là où les artistes eux-mêmes le conduisaient. Les dix-huit primes, sans