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cours de l’exercice 1895. » En cas de rachat par l’État, les compagnies auraient droit au remboursement des dépenses complémentaires autres que celles de matériel roulant, sauf réduction d’un quinzième pour chaque année écoulée.

Telles sont les célèbres conventions de 1883 : elles contiennent encore d’autres stipulations dans le détail desquelles nous n’avons pas à entrer ici, et ont elles-mêmes déjà subi certaines modifications. L’un des caractères communs saillans en est la reconnaissance renouvelée aux compagnies du droit de prélever certains dividendes fixes pour leurs actionnaires : en cas d’insuffisance des recettes nettes pour parfaire le service des obligations et de ce dividende, l’Etat est tenu de verser la différence à titre de garantie d’intérêt. Ce dernier engagement a été pris explicitement jusqu’en 1934 et 1935 vis-à-vis de l’Est et de l’Ouest; le Nord et le Lyon ne le réclament pas au delà de 1915, date fixée par les conventions de 1859.

Au contraire l’Orléans et le Midi ne sont pas d’accord avec l’Etat. Celui-ci ne considère pas que les conventions de 1883 aient modifié, pour ce qui concerne ces deux compagnies, la date primitive de 1915, tandis qu’elles croient pouvoir prétendre, en vertu des mêmes conventions, à la garantie d’intérêt pour toute la durée de leur concession. Le différend est soumis au Conseil d’Etat. Les textes sont obscurs et l’interprétation délicate. L’Etat affirme que, puisqu’il a explicitement déclaré étendre pour l’Est et l’Ouest sa garantie jusqu’en 1934 et 1935, son silence vis-à-vis des quatre autres Compagnies prouve bien que la date de 1915, fixée par les conventions de 1859, reste toujours en vigueur. Le Midi et l’Orléans répondent que la rédaction de leurs conventions est différente, que ce délai a été implicitement abrogé, qu’elles ont d’ailleurs fait des déclarations dans ce sens à leurs assemblées d’actionnaires.

En réalité, la question de la durée de cette garantie d’intérêt était loin d’avoir en 1883, aux yeux des négociateurs de part et d’autre, l’importance qu’elle a acquise depuis lors. Ils entrevoyaient, dans un délai relativement court, un partage de bénéfices entre l’Etat et les compagnies ; ils ne mesuraient pas l’étendue du fardeau résultant des lignes nouvelles dont les recettes ne suffisent pas à payer les frais d’exploitation. Peut-être exagère-t-on aujourd’hui les craintes, après s’être, il y a dix ans, laissé aller à des espérances excessives.