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prospères, tantôt incapables d’exécuter leurs engagemens, n’avaient réussi en 1848 qu’à mettre 2 216 kilomètres en exploitation.

L’Empire, résolu à doter la France du réseau qu’elle réclamait, chercha dès le début à mettre les compagnies en mesure d’accomplir cette œuvre. Il y réussit en prolongeant à 99 ans la durée de leurs concessions, ce qui leur permettait de diminuer les charges annuelles de l’amortissement de leur capital et les encourageait à entreprendre les travaux de longue haleine dont elles auraient ainsi le temps de récolter les fruits. C’est alors que se constituèrent les six grands groupes qui existent encore aujourd’hui. Cette seconde période vit le développement le plus remarquable de notre réseau qui quadruple en six ans, et, de 4 000 kilomètres concédés en 1852, passe à 16 000 en 1858.

Mais les compagnies avaient accepté un fardeau trop lourd. L’État entra en négociation et conclut avec elles les conventions de 1859, qui marquent le point de départ d’une troisième période, durant laquelle les chemins de fer furent régis par le système devenu célèbre sous le nom du déversoir. On distingue l’ancien et le nouveau réseau, c’est-à-dire les lignes principales existant avant 1857 et les lignes secondaires concédées avant et depuis cette époque. Les conventions de 1859 attribuent à l’ancien réseau un certain revenu kilométrique qui, outre le service des obligations, assure aux actions de chaque compagnie un dividende minimum. Le nouveau réseau est doté pour cinquante ans, à partir du 1er janvier 1865, d’une garantie d’intérêt par l’Etat sur la base de 4,655 pour 100[1], amortissement compris. Cette garantie ne devait jouer qu’en cas d’insuffisance des produits nets et constituait une avance à rembourser à l’Etat par les compagnies, dès que les produits dépasseraient l’intérêt garanti et les dividendes stipulés. L’idée maîtresse de ces conventions était de faire construire par les compagnies les. lignes nouvelles reconnues nécessaires et de combiner à cet effet leurs efforts avec les sacrifices que l’Etat consentait, tant en subventions directes que sous forme de garantie d’intérêt. Les compagnies s’engageaient à appliquer au nouveau réseau tout l’excédent de produits de l’ancien réseau, après prélèvement des sommes nécessaires au service du capital constitutif de cet ancien réseau, tant en obligations qu’en actions. Les dividendes réservés étaient de 30 francs pour l’Est, 47 pour

  1. Le taux d’intérêt réellement accordé était 5,75 p. 100. On augmentait le revenu réservé k l’ancien réseau de façon à fournir un appoint de 1, 10 p. 100, nécessaire pour compléter, avec le taux garanti de 4,65 p. 100, l’intérêt et l’amortissement effectifs des emprunts contractés pour l’exécution du nouveau réseau.