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nombre des conditions favorables au développement des maladies. Mais, en réalité, les périodes de croissance, où les processus de nutrition sont les plus énergiques, ne peuvent être et ne sont que des périodes de résistance : c’est dans le temps qui suit les périodes de croissance et surtout les périodes de croissance rapide que la susceptibilité se développe.

Si les troubles d’évolution du système nerveux sont les plus importans au point de vue de la genèse des maladies, c’est que c’est lui qui domine les phénomènes de la vie de nutrition aussi bien que ceux de la vie de relation. Les troubles d’évolution de ce système peuvent servir à rendre compte des nombreuses variétés des manifestations morbides dans les familles pathologiques.

Le défaut de ressemblance dans la descendance qu’on retrouve dans les familles pathologiques et tératologiques met en évidence le défaut d’énergie embryogénique qui s’accentue dans ces familles au point d’en arriver à la stérilité au bout de quelques générations. L’atténuation de la puissance embryogénique qui peut se traduire par des défauts d’élémens très divers, peut servir à l’interprétation de ce qu’on appelle l’hérédité morbide dissemblable et de cette autre hérédité paradoxale désignée sous le nom d’hérédité morbide collatérale.

Il est à remarquer que la dissemblance dans les familles morbides n’est pas absolument désordonnée. Le chef d’une famille de dégénérés donne naissance à des produits dissemblables par des troubles d’évolution divers et diversement situés qui créent des prédispositions morbides variées, mais dont la variété n’est pas telle qu’on ne retrouve dans leurs manifestations des analogies capables de constituer un air de famille. La dégénération en effet ne s’opère pas sans une certaine règle. Comme l’a bien vu Morel, les dégénérés dissemblables d’une famille ressemblent à des dégénérés dissemblables d’une autre famille, de sorte que d’où qu’ils viennent, les dégénérés, comme les monstres, sont susceptibles d’une classification scientifique. La dégénérescence a ses lois comme l’évolution normale : quelle que soit sa cause, elle se manifeste sous un nombre relativement restreint de formes communes.

La théorie de la nature tératologique des manifestations de l’hérédité morbide est actuellement la seule qui puisse permettre d’expliquer comment des conditions très diverses de la génération, telles que l’extrême jeunesse ou l’âge trop avancé des générateurs, leur disproportion d’âge, les troubles permanens ou même passagers de leur vitalité, l’ivresse, les intoxications, les infections, l’épuisement accidentel du système nerveux, la neuras-