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Je ne veux pas rechercher si ce nombre n’est pas aujourd’hui trop considérable. Il a vraiment monté en ces dernières années d’une façon inquiétante ; de 6 212 en 1891, il est passé à 7 169 en 1892, à 7 589 en 1893, et à 8 897 en 1894, soit une crue de 2 685 en trois ans. Il est probable que ce phénomène ne se reproduira plus avec la même intensité, et que les causes, en partie temporaires, qui l’ont produit, — spécialement la suppression de l’officiat de santé par la loi du 30 novembre 1892, — ont maintenant donné leurs pleins effets. Je ne veux pas me demander davantage si, en présence de cette montée, ce ne serait pas un bien que de l’enrayer par un obstacle. Les règlemens d’études ne sont pas des vannes destinées à maintenir à un niveau numérique certaines professions. L’étiage qu’ils établissent est tout intellectuel et scientifique. Or, de ce point de vue, il faut bien reconnaître que, partout, avec le progrès des sciences, s’accroît la difficulté des professions savantes. La licence ès sciences est loin d’être aujourd’hui aussi facile qu’à l’origine ; tout ce qui a été découvert doit être su désormais, et il n’y a de remède à cette écrasante surcharge que la subdivision du travail et la spécialité. Le doctorat en médecine n’a pas le privilège d’échapper à cette loi. Mais cela ne touche qu’indirectement à l’objection que nous examinons en ce moment. Il est à souhaiter que les facultés des sciences se montrent plus sévères à l’examen du certificat d’études physiques qu’elles ne pouvaient l’être à celui du baccalauréat restreint. La foule d’étudians qui prennent ainsi la première inscription de médecine s’en trouvera certainement diminuée. Mais, sans se demander si ce sera un bien ou un mal, ce sera, un an plus tôt, le triage qui actuellement s’opère à la faculté de médecine elle-même, au premier examen, après l’année des sciences accessoires. Le nombre des diplômes de docteur en médecine délivrés en 1883-84 était de 595 ; il a été de 635 en 1891-92, et de 723 en 1892-93 : cet accroissement est loin d’être proportionnel à l’accroissement du nombre des étudians. Cela tient à une cause que nous avons déjà signalée. Dans toute filière, il y a déperdition de matière ; dans toute carrière, à certaines étapes, il se fait une sélection. Actuellement, de la première à la seconde année, le nombre des étudians en médecine diminue d’un tiers, parfois de moitié. Cette différence ne se retrouve plus. Ce triage inévitable, s’il continue de se faire, se fera non plus à la faculté de médecine mais à la faculté des sciences ; sur ce point encore, la réglementation nouvelle n’aura produit qu’un changement de lieu. Et, sélection pour sélection, ne vaut-il pas mieux qu’elle se fasse avant l’entrée à la faculté de médecine ? Ceux qui en franchiront la porte ne se seront pas mépris sur leur vocation ; vraiment étudians en