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avec la physiologie et la médecine, il est illogique de donner cet enseignement à des élèves de première année. Comment faire comprendre les phénomènes chimiques de la respiration et de la digestion à des élèves qui ne connaissent encore ni l’anatomie ni la physiologie du poumon et des organes digestifs ? Comment pourra-t-on s’intéresser à l’étude des parasites végétaux ou animaux, causes de tant de maladies, si l’on n’a pas déjà une connaissance étendue de la pathologie ? Je pourrais étendre ces exemples à l’hygiène, à la thérapeutique, et à la clinique. Si donc il est indispensable que l’étude de la médecine soit préparée par une année au moins, consacrée à faire connaître à nos futurs élèves les lois générales qui seront plus tard utilisées quand il leur faudra étudier les phénomènes de la vie, ce n’est qu’en troisième et en quatrième années que les professeurs de sciences chimiques, physiques, et naturelles, dans une faculté de médecine, peuvent faire, avec fruit, la véritable application de ces sciences à la médecine théorique et clinique. »

Et comme l’enseignement de la physique, de la chimie, de l’histoire naturelle, ramassé tout entier en première année, avant l’anatomie, l’histologie, la physiologie, la pathologie et les cliniques ne reparaissait plus, ni en seconde, ni en troisième, ni en quatrième année, c’est-à-dire là où il eût pu prendre un caractère d’application à l’art de guérir, il en résultait cette double conséquence : les facultés de médecine enseignaient de la physique, de la chimie et de l’histoire naturelle ce que leurs élèves en auraient dû savoir en entrant chez elles ; elles n’en enseignaient pas ce qu’elles auraient dû leur apprendre. D’où amoindrissement des études, et abaissement de l’enseignement. — Avec le progrès des sciences expérimentales, la physique, la chimie et certaines parties des sciences naturelles ne sont pas un accessoire dans les études médicales ; elles y sont un élément principal ; c’est d’elles surtout que viennent les faits nouveaux, les lois nouvelles, les découvertes, dont le médecin fait ensuite son profit. Loin d’être exclus des facultés de médecine, ces enseignemens y ont droit à une place éminente ; mais à la condition d’y être à leur place, à la place d’où ils peuvent éclairer les faits d’ordre médical, en rapport constant avec la physiologie, la pathologie générale, la thérapeutique, l’hygiène et les cliniques. Les réduire à un rôle élémentaire, propédeutique, en faire la simple doublure d’un baccalauréat restreint, c’est enlever aux facultés de médecine une de leurs maîtresses pièces. Ainsi, par une revanche de la logique méconnue, le régime de 1878, imaginé pour renforcer, dans la médecine, l’élément scientifique, aboutissait à l’affaiblir encore davantage.