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très long espace de temps, et pendant ce long espace de temps la clause d’exécution de la décharge pour excès d’imposition par rapport au revenu avait fini par détruire en fait le principe de fixité auquel l’Assemblée Constituante avait attaché pourtant tant d’importance. Arthur Young, qui a parcouru la France pour étudier son agriculture, fait de la variabilité de l’impôt foncier un très grand grief aux constituans. Il leur reproche, dans ses notes de voyage de 1792, d’avoir voulu poursuivre, sans s’attacher à la réalité des faits, leur doctrine théorique du produit net. « En se laissant entraîner par le jargon de produit net, en rendant l’impôt variable, on a soulevé tous les inconvéniens, toutes les incertitudes. Le même décret qui fixait l’impôt à 300 millions enjoignait aussi qu’il n’allât pas au-delà du cinquième du produit net (c’est le sixième qui ne devait pas être dépassé aux termes de la loi du 17 mars 1791). Tout homme put donc rejeter ce qui dépassait cette proportion. Les petits propriétaires, si nombreux en France, se réfugièrent derrière les équivoques du produit net. » Il est certain que le produit net n’est autre chose pour la petite culture que le mode de vie du cultivateur. Sa vie, plus ou moins large selon les années, est la seule mesure de son produit net.

La décharge pour défaut de proportionnalité doit donc être entendue comme fournissant une méthode de révision et non pas comme une correction de la fixité ; et par suite, la disposition qui la rendrait légale ne devrait pas entrer, si ce n’est à titre temporaire, dans la loi organique à refaire.

Outre la réforme nécessaire dans la méthode de révision du cadastre, il y en a une autre qui pourrait être tentée et dont les conséquences seraient d’une extrême importance pour l’agriculture : c’est l’extension nécessaire de l’article 13, titre II de la loi de 1790, dont l’interprétation a été restreinte, mais qui pourrait être élargie sans altérer le caractère d’universalité de l’impôt foncier.

Je fais allusion à l’article — qui n’a d’ailleurs jamais cessé d’être en vigueur — où il est dit que les bâtimens servant aux exploitations rurales ne seront soumis à l’impôt foncier que poulie terrain qu’ils occupent. L’Instruction l’a restreint aux bâtimens inutilisés pour l’habitation des hommes ; on n’a fait exception que pour les bâtimens où les gardiens logent à côté de leurs animaux pour être à portée de les surveiller et de les nourrir.

Il convient de prendre le texte de la loi dans sa signification la plus générale : aucun des bâtimens servant aux exploitations rurales, logeant les hommes aussi bien que les animaux, ne devrait