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les puissances étrangères sont toujours amicales et pacifiques ; toutefois il y a lieu de regretter que certaines questions soulevées relativement à l’Afrique entre mon gouvernement et celui de la République française ne soient pas encore résolues. Je désire qu’elles soient réglées sans aucun retard inutile, et j’ai entamé d’amicales négociations pour cet objet. » Le vœu du gouvernement de la Reine est certainement partagé à Paris ; mais en vérité on n’avait pas pu se douter jusqu’à ce jour que l’intensité en fût aussi pressante. Depuis plusieurs années, nous avons fait des efforts vingt fois renouvelés pour liquider les questions africaines pendantes entre l’Angleterre et nous, et il ne nous a jamais été possible d’entamer sérieusement la conversation. Beaucoup de retards certainement inutiles se sont produits, sans qu’il y eût de notre fait. N’est-il pas surprenant, par exemple, que nos réclamations au sujet de nos missionnaires si odieusement massacrés dans l’Ouganda n’aient pas encore reçu satisfaction ? Nous n’avons jamais pu arracher une réponse définitive sur ce point qui nous tient à cœur. Et sur combien d’autres encore n’avons-nous pas été plus heureux ! La liste en serait longue ; mais à quoi bon la dresser ? L’Angleterre montre à son tour une grande hâte de causer : causons. Seulement, on ne voit pas encore très bien où et avec qui nous pourrons le faire. Il y a quelques semaines, après avoir échangé quelques vues avec M. Hanotaux sur la convention congolaise, lord Dufferin est parti subitement pour l’Angleterre ; il n’est revenu qu’au moment où. M. Hanotaux avait annoncé et exécutait déjà son propre départ pour Vichy. Lord Dufferin est retourné à Londres. Lord Rosebery se promenait ces jours derniers à Paris. Lord Kimberley, ministre des affaires étrangères, vient également de partir en voyage. On ne sait à qui parler, et cette villégiature générale fait contraste avec la légère, oh ! très légère nuance d’impatience que présente le message de la Reine. On ne saurait d’ailleurs souhaiter trop vivement qu’un accord vraiment complet s’établisse entre l’Angleterre et nous en Afrique.

De même en Asie. Le message ne se montre pas moins attentif aux affaires du Mékong qu’à celles du Congo, du Niger ou du Nil ; mais, ici, il émet quelques affirmations qui appellent de notre part des réserves. « Je suis convaincue, dit le message, que le règlement définitif des questions résultant du récent traité conclu entre la France et le Siam ne saurait être ajourné beaucoup plus longtemps, et, en attendant, j’ai chargé des commissaires de fixer sur les lieux mêmes, de concert avec les commissaires français, les limites qu’il sera convenable de donner à une région neutre dans le voisinage du Mékong, qui séparera mes possessions de celles de la République française. » Nous ne traiterons pas pour le moment du premier objet touché par le message ; mais est-il bien exact que les commissaires envoyés de part et d’autre sur le Haut-Mékong aient été chargés de « fixer sur les