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voir ces braves gens fort propres et de blanc vêtus, en manière de vestales, on ne reconnaissait guère le chauffeur classique. Pendant la durée entière de l’exposition, le chauffage au pétrole a pleinement réussi ; ses mérites semblent donc surabondamment prouvés. C’est surtout dans les machines mobiles, comme Henri Sainte-Claire Deville l’avait montré, il y a trente ans, par ses expériences au chemin de fer de l’Est, qu’apparaît l’avantage de ce combustible, puisque, pour la même puissance calorifique, il occupe un volume trois fois moindre que la houille.

Parmi les machines à vapeur, on ne rencontrait guère de nouveauté importante. Exceptons pourtant la turbine de M. de Laval, exposée par la section suédoise : la vapeur se détend complètement dans les tubes lanceurs, et la roue, poussée par le courant rapide d’un fluide homogène, effectue jusqu’à trente mille tours par minute. Comme d’ailleurs, laissant à la roue un jeu suffisant, on l’a montée sur un axe flexible, elle se centre d’elle-même et prend la stabilité spéciale aux grandes vitesses. L’appareil, de dimensions très restreintes, exécute un travail considérable et suffisamment économique. D’après les essais officiels faits à Stockholm sur une turbine de soixante-quatre chevaux, la consommation par heure et par cheval effectif ne s’élèverait qu’à neuf kilogrammes de vapeur.

C’est principalement l’ampleur des proportions qui distinguait les machines américaines. Entre autres, on en remarquait une à quadruple expansion, produisant à l’ordinaire deux mille chevaux, et capable d’en développer quatre mille. Son poids total dépassait trois mille tonnes. Le volant, qui avait neuf mètres de diamètre et pesait soixante-dix tonnes à lui seul, effectuait soixante tours en une minute. Cette machine colossale appartenait à la compagnie Allis, de Milwaukee, la cité la plus importante du Wisconsin, sur les bords du lac Michigan. Au moyen de deux énormes courroies, elle commandait deux grandes dynamos Westinghouse, pouvant alimenter trente mille lampes de seize bougies. Comme contraste avec ces courroies d’une largeur inusitée, on trouve fréquemment, à l’intérieur des usines, le système de transmission par cordes, évidemment imité des funiculaires, et paraissant surtout avoir pour objet d’éviter l’encombrement.

Dans un pays aussi riche que l’Amérique en fleuves et en rivières, l’usage des machines hydrauliques est naturellement très répandu. Les turbines servent à utiliser les chutes d’eau les plus modestes ou les plus puissantes, et jusqu’à celle du Niagara. On emploie beaucoup, et pour les travaux des mines particulièrement, la roue Pelton, sorte de roue Poncelet, dont l’auget,