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M. Wauters, l’Ouellé et l’Oubangui composaient bien les deux tronçons d’une seule et même rivière.

Simultanément d’autres découvertes s’accomplissaient.

De 1886 à 1889, les deux affluens que reçoit le Congo à droite, en amont de l’Ouellé-Oubangui : la Mongalla et le Roubi, étaient explorés à leur tour; le premier par Hodister, — cet infortuné qui devait, en 1892, périr victime des Arabes, dans d’atroces souffrances, — le second, par le lieutenant Becker. Cet officier avait remonté le Roubi, puis un de ses affluens, le Likati[1]. L’ayant abandonné à son extrémité navigable, il franchit un seuil étroit et atteignit l’Ouellé, en amont des chutes qui avaient arrêté van Gèle. Non seulement ces voyages satisfaisaient la curiosité scientifique et éclaircissaient certaines obscurités du régime hydrographique du Congo, mais encore leur importance politique était de premier ordre. Ils démontraient, en effet, que l’Ouellé était doublement accessible, qu’on remontât soit l’Oubangui, soit le Roubi. Or, si l’on veut bien se rappeler ce qui précède relativement à la direction de cette rivière, on comprendra que, grâce à ces découvertes, les Belges savaient par quelle voie atteindre la province équatoriale en partant de Léopoldville.

Prétendre que Greenfell, van Gèle et Becker aient eu des vues aussi lointaines serait évidemment inexact. Ils ont fait des découvertes par profession d’explorateurs. Il n’en est pas moins certain que par leurs voyages, ils ont mis les Belges en position de jouer un rôle prépondérant dans le règlement de la succession de l’Egypte dans la province équatoriale. Cette œuvre d’exploration se doubla d’une œuvre de conquête. Des stations (c’est-à-dire quelques huttes entourées de palissades) furent établies à Zongo et à Banziville, sur la rive gauche de l’Oubangui; à Ibembo, sur le Roubi ; à Bazoko, au confluent de l’Arouhimi et du Congo. Mais ce fut surtout aux environs des chutes de Mokouangou, que les Belges s’efforcèrent de prendre très fortement position.

En ce point se confondent plusieurs cours d’eau. L’Ouellé-Oubangui reçoit à droite son plus puissant affluent le Mbomou, qui draine tout le pays Sandeh et le Dar Fertit. En amont de ce confluent, dans le Mbomou lui-même, se déverse le Mbili. Cette position commande donc la voie de la province équatoriale. Les Belges construisirent un poste sur la rive droite de l’Oubangui à Yakoma, et s’efforcèrent de conquérir l’amitié des princes indigènes.

  1. Le Roubi est également nommé Itimbiri, le Likati Riketti. La nomenclature est encore indécise dans cette partie de l’Afrique.