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posés par la révolution de 1889 et par les mouvemens politiques désordonnés qui l’ont suivie : pléthore de circulation fiduciaire, discrédit du papier, hausse du change. Le Chili s’occupe à se guérir de ses blessures balmacédistes en suivant un rigoureux régime économique. La République Argentine s’est aussi donné le luxe d’une révolution, et aussitôt les difficultés économiques ont relégué toutes les autres au second rang. Moratorium, banqueroute partielle, débauche de circulation fiduciaire, prospérité intérieure par le développement de l’exportation, arrangement avec les créanciers étrangers, tels devraient être les titres des chapitres d’une histoire de la République Argentine dans les dernières années. Le document politique le plus remarquable qu’ait publié le gouvernement à Buenos-Ayres depuis 1890 est l’exposé rédigé par le ministre des finances, M. Terry, sur la situation économique de la république à la fin de 1893.

L’Afrique avec ses mines de diamans de Kimberley, ses innombrables exploitations aurifères du Transvaal, ses laines du Cap, ses grandes compagnies commerciales, ses courses d’explorateurs vers le lac Tchad, nous apparaît comme une vaste école de colonisation, un champ international d’application des études commerciales et géographiques.

Au delà de l’océan Indien, voici l’Inde des Rajahs, si poétique si pittoresque ; toute la péninsule est pleine du bruit que fait le cours de la roupie, de la perturbation jetée dans les transactions commerciales par la suspension de la frappe de l’argent décrétée en juin 1892. Le gouvernement anglo-indien est subitement en déficit; il lui faut, pour parer ce coup, emprunter dans la métropole 250 millions de francs, et protéger l’industrie naissante du pays contre la concurrence de la Chine par des taxes à l’entrée des marchandises.

Dans l’Australasie enfin, les grands événemens des quatre dernières années ont été trois grèves colossales qui toutes ont tourné à la confusion des associations ouvrières et de leurs prétentions à la suprématie sur le continent australien, puis le krach des banques à Melbourne et à Sydney. Il y faut ajouter, là encore, la question douanière, et, dans la partie septentrionale, le problème du travail étranger par l’importation de coolies ou de Canaques.

Ainsi le monde entier est en proie au travail des problèmes économiques. Les détails varient, mais le fond est uniforme ; c’est toujours, d’une part, le conflit entre les consommateurs qui veulent acheter à bon marché les produits de tous pays, et les producteurs qui réclament une protection contre la concurrence