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ou moins aisément à l’intérieur de ce corps ; il passe ainsi, tout en cheminant, par des alternatives, par des accès de facile transmission et de facile réflexion. Quelle est la cause de ces accès ? En traversant le milieu dans lequel ils se meuvent et dont les molécules qui agissent sur eux sont, en retour, soumises à leur action, les corpuscules lumineux y engendrent des vibrations extrêmement rapides ; une fois ce milieu mis en vibration, la marche d’un corpuscule qui le traverse y subit des perturbations périodiques qui accélèrent cette marche et la retardent alternativement.

Selon Newton, rien de plus difficile à expliquer que ces accès dans la théorie des ondulations, « à moins que l’on ne veuille admettre la présence simultanée, en tout lieu, de deux éthers vibrans ; l’un dont les vibrations constitueraient la lumière ; l’autre, animé de vibrations que l’on supposerait plus rapides et qui, en troublant les vibrations du premier, détermineraient leurs accès ».

Où Newton voyait-il la nécessité, pour la théorie des ondulations, d’introduire ces deux éthers ? Dans la théorie de l’émission, pour expliquer les accès que subit périodiquement le corpuscule lumineux. Newton a été obligé de faire intervenir le milieu que traverse le corpuscule et de supposer ce milieu animé de vibrations très rapides ; il a attribué le caractère progressif de la lumière au corpuscule et le caractère périodique aux mouvemens du milieu. Mais, dans la théorie des ondulations, pourquoi ferait-on de ces deux caractères l’apanage de deux substances distinctes ? pourquoi n’admettrait-on pas que le mouvement de l’éther se propage des régions éclairées aux régions obscures, tandis qu’il prend le caractère périodique dans les régions dont l’éclairement est devenu permanent ? n’en est-il pas ainsi pour le mouvement de l’air qui constitue le son ?

Reprenons cette analogie de la lumière et du son, dont Huygens avait tiré de si belles conséquences. Qu’est-ce qu’un son simple ? Une vibration périodique simple, un mouvement pendulaire des molécules du corps sonore ; la période de cette vibration marque la hauteur du son considéré dans la suite illimitée des sons. Que sera-ce donc qu’une lumière simple ? Un mouvement périodique simple de l’éther ; la période de ce mouvement marquera sa couleur, sa position dans le spectre ; cette période sera le caractère invariable qu’un rayon de lumière monochromatique doit, d’après Newton, porter sans cesse avec lui.

Au sein d’un faisceau de lumière, l’état de l’éther sera exactement semblable à l’état de l’air qui remplit un tuyau d’orgue ; le long de cette colonne d’air en vibration alternent, à intervalles