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de difficultés, de tracas et de déboires que les plus intrépides redoutent de s’y engager et que les plus tenaces aspirent à s’en retirer.

Changer ce régime, qui date de loin, ne saurait être l’œuvre d’un homme ni d’un jour. Mais puisque nous avons maintenant un ministère, il importe que de ce ministère date une ère nouvelle. Il importe, sous peine de voir compromises les plus belles espérances, qu’après un débat public, où toutes les opinions pourront s’affirmer, un plan de gouvernement et d’administration soit enfin arrêté ; que les ministres qui se succéderont s’attachent à le respecter et à le faire exécuter et que chaque jour marque un pas dans une voie au bout de laquelle est le succès.

C’est comme contribution à l’étude de l’organisation prochaine que nous présentons les observations suivantes.


I. — LE DOMAINE DU MINISTÈRE DES COLONIES.

Le premier ministre des Colonies va certainement être sollicité de délimiter son domaine. Nos possessions, comme elles sont éparses par le monde, sont éparpillées parmi les ministères. Quelques-unes dépendent du ministère des Colonies ; d’autres, moins nombreuses mais aussi importantes, dépendent du ministère de l’Intérieur, comme l’Algérie, ou du ministère des Affaires étrangères comme Madagascar et la Tunisie. Il semblerait naturel de les confier maintenant toutes au seul ministère des Colonies. Et là peut-être sera la solution de l’avenir. L’Algérie, qui, durant de longues années, a tranquillement pu s’engraisser au régime des « rattachemens », n’a plus rien désormais à attendre du ministère de l’Intérieur. La Tunisie, qui ne se plaint pas de la tutelle des Affaires étrangères, aura peut-être plus tard intérêt à être remise aux mêmes mains qui dirigeront sa voisine. Madagascar enfin, le jour où nous y serons solidement établis et songerons à l’exploiter, n’aura plus de raisons de dépendre, aura peut-être même des raisons de ne dépendre plus du quai d’Orsay. Mais, pour le moment, on ne voit pas d’avantages à transférer soit la Tunisie soit même l’Algérie à un ministère qui. de l’avis de tous, a besoin d’être réorganisé et, sans être pessimiste, on peut apercevoir des inconvéniens à déplacer Madagascar, qui en est encore évidemment à la période diplomatique.

Le domaine du ministère des Colonies, au moins à l’heure présente, ne semble donc pas devoir être élargi. Si l’on ne risquait de passer pour paradoxal, on pourrait même soutenir qu’il gagnerait à être diminué.