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désigné consul. L’empereur le choisissait lui-même, et il devait rester à son poste tant qu’il plairait au prince de l’y laisser. On comprend qu’il ne fût pas nommé dans les mêmes conditions que le proconsul : il avait une tâche moins brillante peut-être, mais plus difficile. C’est sur lui que reposait la sécurité des deux provinces, et il était chargé d’arrêter les ennemis à la frontière. On ne pouvait donc pas le prendre au hasard, comme l’autre, et il eût été dangereux de l’enlever trop tôt à ses fonctions, quand il les remplissait bien.

Au de la de la Numidie, du fleuve Ampsaga (Oued-Kébir) à l’Atlantique, s’étendait la Mauritanie. Quand le roi du pays, Ptolémée, eut été tué par Caligula, ses États furent réunis à l’empire. On en fit deux provinces : d’abord la Maurétanie césarienne, qui comprenait notre département d’Oran et la plus grande partie de celui d’Alger, avec Césarée, la ville de Juba II, pour capitale ; puis la Maurétanie tingitane qui tirait son nom de Tingis (Tanger), qui en était la ville la plus importante. Ce furent deux provinces impériales, c’est-à-dire de celles dont l’empereur se réservait de nommer les gouverneurs ; seulement, comme elles étaient fort imparfaitement connues et très peu civilisées, il n’y envoya pas des légats pour les gouverner, mais de simples intendans (procuratores), et ce nom montre qu’il les traitait comme ses domaines propres et qu’il entendait les tenir tout à fait sous sa main. Ces procurateurs étaient pris parmi les chevaliers ; ils recevaient le titre de vir egregius, et touchaient un traitement de deux cent mille sesterces (40 000 francs). Ainsi que les légats, ils étaient chargés à la fois de l’administration civile et du commandement militaire ; mais ils ne commandaient pas, comme eux, à des soldats des légions, c’est-à-dire à des citoyens romains : ils n’avaient sous leurs ordres que des troupes auxiliaires, levées parmi les nations vaincues.

Ainsi, pendant la plus grande partie de l’empire, les possessions des Romains dans l’Afrique du Nord ont formé quatre provinces : l’Afrique proconsulaire, la Numidie et les deux Maurétanies. Il est à remarquer que l’importance et la civilisation de ces provinces diminuaient à mesure qu’on s’avançait vers l’Océan. La Proconsulaire rivalisait de richesses, d’éclat, de culture littéraire, avec l’Italie ; la Numidie était déjà plus rude, moins paisible ; quant aux Maurétanies, surtout à la Tingitane, elles étaient en partie barbares.


III

Le premier devoir de celui qui gouverne un pays est d’y maintenir la paix : c’est ce qui n’était pas facile en Afrique, au milieu