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des premiers à utiliser les projections dans l’enseignement médical. Grâce à ses descriptions si vivantes et aux représentations variées qui les illustraient, l’auditeur sortait imprégné du sujet, qui restait fixé dans sa mémoire.

Ce n’est pas par ses leçons orales seules que Charcot a si puissamment contribué à la diffusion des connaissances sur les maladies du système nerveux. Il a fondé plusieurs revues qui répandaient les travaux de ses élèves, en même temps qu’elles faisaient connaître en France les résultats les plus importans des recherches faites à l’étranger. Par son enseignement et par l’appui qu’il a donné aux travailleurs, Charcot doit être considéré comme le patron de la neurologie en France.

Mais ce n’est pas seulement par l’enseignement que Charcot s’est acquis une célébrité européenne : c’est aussi par ses travaux personnels, qui ont mis au jour un nombre considérable de faits nouveaux. Si on n’entre pas dans des détails techniques, on peut exposer son œuvre en peu de mots. Il s’est principalement préoccupé de trois ordres de faits : les localisations fonctionnelles dans les centres nerveux ; l’hystérie ; l’hypnotisme.

Il y a peu d’années encore, les centres nerveux, bien qu’on les sût constitués de deux sortes d’élémens principaux, de cellules et de tubes nerveux, étaient considérés comme des masses homogènes où les diverses fonctions nerveuses avaient leur siège, mais sans localisation spéciale. Les physiologistes du commencement du siècle avaient bien vu que les nerfs sensitifs et les nerfs moteurs ne se perdaient pas dans les mêmes cordons de la moelle ; mais c’est surtout à partir du moment où on sut qu’à la suite de certaines lésions du cerveau il se fait dans la moelle des dégénérations à siège fixe, et que d’autre part certains cordons de la moelle peuvent être affectés systématiquement et primitivement, que la question des localisations dans la moelle entra vraiment dans la voie du progrès. Charcot est un de ceux qui ont le plus contribué à cette étude importante : il a éclairé l’anatomie pathologique et la clinique de la paralysie spinale de l’enfance, de l’amyotrophie spinale protopathique, de la paralysie labio-glosso-laryngée, de l’ataxie locomotrice, de la sclérose des cordons de Goll, des dégénérations secondaires de la moelle, de la syringomyélie, etc. Ces divers travaux ont montré que les différentes parties de la moelle, les cornes antérieures, les cornes postérieures de la substance grise, les divers cordons de la substance blanche, peuvent être lésés isolément, et que ces lésions systématiques entraînent des troubles spéciaux ; chacune de ces structures a donc des fonctions particulières. Il est reconnu en effet aujourd’hui que les cornes antérieures de la substance grise ont des fonctions mo-