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majeur, la majorité étant, dans le royaume de Néerlande, fixée à l’âge de 23 ans.

Tel a été, durant presque tout le règne de Guillaume III, de 1848 à 1887, le système électoral des Pays-Bas. Le caractère en était nettement censitaire, avec un cens relativement élevé, puisqu’il ne descendait nulle part au-dessous de 20 florins ou 42 francs de contribution directe. Ce chiffre minimum de 20 florins était inscrit dans la constitution et, pour abaisser le cens, il ne fallait rien moins qu’une révision de la loi fondamentale. Or chacun sait que le roi Guillaume III n’avait pas vu jadis sans chagrin, ni même sans colère, Guillaume II, son père, sanctionner les constitutions, modifiées par rapport à celle de 1815, de 1840 et de 1848. La légende prétend que l’on dut presque aller le chercher à Londres et le contraindre à prendre le pouvoir, dont il ne voulait pas, tant il le trouvait diminué ; qu’il lui répugnait d’être roi dans d’aussi étroites limites. Ce qui est sûr, c’est que la proclamation par laquelle il assumait le gouvernement, au mois de mars 1849, marque plutôt la résignation que l’enthousiasme. Elle est sèche, concise et très brève, tenant en ces quatre ou cinq lignes : « Guillaume Ier a reçu le pouvoir pour l’exercer d’après une constitution. Guillaume II, de concert avec la représentation nationale, a modifié la constitution selon les exigences du moment. Ma tâche est de garantira la constitution son application intégrale. En m’acquittant de cette tâche, je compte sur le constant appui de tous les pouvoirs constitutionnels. » Si, après cela, et pendant plus de quarante ans, Guillaume III d’Orange-Nassau fut le modèle des souverains, volontairement ou involontairement soumis à une constitution, il n’empêche que de toute évidence il n’aimait guère à en entendre parler et ne pouvait être tendre aux promoteurs de révisions, c’est-à-dire, pour lui, de diminutions nouvelles.

Ce ne fut, en effet, qu’en 1883 qu’une ordonnance royale nomma une commission de seize membres « chargée d’examiner les dispositions de la loi fondamentale qu’il serait utile et actuellement opportun de modifier » ; ce n’est qu’en 1887 que la révision fut menée à bonne fin, non sans luttes et sans danger, le ministère Heemskerk, battu sur un point important, ayant, dans l’intervalle, donné puis retiré sa démission. Parmi les paragraphes modifiés, figuraient ceux qui concernent le droit de suffrage. L’ancien article 76 de la constitution de 1848 devenait, dans la constitution de 1887, l’article 80, dont voici la teneur. Tout le débat, à présent, tourne autour de lui, et la loi que l’on va faire devra le suivre à la lettre, le serrer au plus près et comme se mouler sur lui :