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même, elle travaille, à mettre sa législation électorale d’accord avec sa constitution révisée.

Il en est de même pour les Pays-Bas. Une loi qui étend le droit de suffrage est pendante devant les États-Généraux, et la seconde Chambre en entreprenait récemment la discussion[1]. Les Pays-Bas ne vont pas tout à fait jusqu’au su tirage universel, ou bien ils n’y vont que timidement, avec de vives ou sourdes résistances : toutes sortes dépassions agissent et toutes sortes de raisons déterminent pour ou contre : dans cette seule bataille sur un projet de loi on peut voir, comme à nu, la politique et l’âme même de la politique néerlandaise : vie politique d’une intensité, d’une énergie incomparables et d’autant plus puissantes qu’elles sont plus contenues, car il ne faut pas trop se fier aux apparences, et le fond est agité et mouvant, sous la surface dormante des eaux.


I

La loi fondamentale du royaume des Pays-Bas[2], sanctionnée par Guillaume II, le 14 octobre 1848, portait en son article 76 : « Les membres de la seconde Chambre sont élus dans les districts électoraux, entre lesquels le royaume est divisé, par les habitans majeurs, Néerlandais, en pleine jouissance de leurs droits civils et politiques, et payant en contributions directes un cens qui, eu égard à la situation locale, sera fixé par la loi électorale et qui ne pourra être inférieur à 20 florins ni supérieur à 100. » En même temps était promulguée une loi[3] contenant révision des articles additionnels ; elle réglementait les élections, provisoirement du moins, ainsi qu’il suit. Elle distinguait entre les habitans des villes et les habitans des campagnes ou du plat pays, pour lesquels le cens électoral était porté : dans la Hollande méridionale, la Hollande septentrionale, la Zélande, la province d’Utrecht, à 40 florins ; dans le Brabant septentrional, la Gueldre, l’Overyssel, la province de Groningue, à 32 florins ; dans la Frise (les îles exceptées) à 30 florins ; dans la province de Drenthe, le Limbourg, les îles de la Frise, Ameland et Schiermonnikoog, à 20 florins seulement. Une autre loi[4] définissait les qualités, réclamées par la constitution, d’habitant, de Néerlandais et de

  1. Un projet de réforme électorale est également soumis au Reichsrath autrichien.
  2. Loi fondamentale de 1815, modifiée en 1840 et en 1848.
  3. Loi du 11 octobre 1848, contenant un règlement électoral provisoire, plus tard abrogé, remplacé et en partie reproduit par la loi du 4 juillet 1850.
  4. Loi du 28 juillet 1850.