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inexactitudes. Il a tiré son épingle du jeu, il a décliné toute responsabilité dans cette affaire.

Selon toute apparence, M. le docteur Blum ne se serait pas attiré ce désagrément, s’il n’avait porté contre le feu comte d’Arnim des accusations téméraires ou calomnieuses. On sait que pendant qu’il était ambassadeur d’Allemagne à Paris, M. d’Arnim avait donné au chancelier plus d’un sujet de mécontentement. Il n’avait pas la souplesse que M. de Bismarck exigeait de ses subordonnés, il se permettait d’avoir ses opinions personnelles sur la politique générale et en particulier sur la conduite à tenir avec le gouvernement français. Ce qui était plus grave, il s’adressait directement à l’empereur Guillaume pour le gagner à ses idées, et, ce qui était plus grave encore, la plupart de ses amis étaient des ennemis du chancelier.

Le 7 février 1873, il envoyait un rapport à M. de Bismarck touchant les propositions que lui avait faites M. Thiers au sujet du paiement anticipé de l’indemnité de guerre. Ces propositions furent agréées de M. de Bismarck, qui ordonna à l’ambassadeur de négocier sur-le-champ avec M. Thiers. Du 5 au 12 mars la négociation ayant paru languir, il soupçonna qu’il y avait anguille sous roche, et, s’il en faut croire M. Blum, il découvrit que M. d’Arnim tripotait avec le baron Hirsch et que, pour assurer le succès de leurs communes opérations, il était nécessaire que, conformément au traité du 29 juin 1872, le paiement du dernier milliard ne fût pas effectué avant le 1er mars 1875 ; le nouveau traité eût tout gâté. M. de Bismarck transporta aussitôt à Berlin le siège de la négociation, il traita personnellement avec l’ambassadeur de France, le vicomte de Gontaut-Biron. Le 15 mars, tout était terminé, et M. d’Arnim en fut averti par une dépêche télégraphique.

Un peu plus loin, M. Blum est revenu à la charge. Selon lui, lorsque le comte d’Arnim, rappelé de Paris, témoigna le désir d’être envoyé comme ambassadeur sur les rives du Bosphore, M. de Bismarck fut d’abord surpris de cette demande que rien ne justifiait, mais il cessa de s’étonner en apprenant que le baron Hirsch projetait, lui aussi, d’émigrer à Constantinople. Le fils du défunt a pris vertement à partie le diffamateur qui flétrissait la mémoire de son père, et il a exigé du prince de Bismarck une rétractation formelle, qui ne lui a point été accordée. Le prince s’est servi du journal que dirige M. Maximilien Harden pour faire savoir au public qu’il n’avait rien à voir dans cette querelle, que non seulement il avait refusé de lire les bonnes feuilles du Livre incriminé, qu’il avait défendu qu’on lui en parlât, qu’au surplus les récits de M. Blum n’étaient pas toujours exacts, ni suffisamment documentés. Cette hautaine et cruelle déclaration a dû causer quelque déplaisir à M. Blum ; mais il peut se rassurer. Quiconque lira son livre avec quelque attention conviendra que ses entretiens avec le