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représentans les plus considérés de la caste prennent place. Ce conseil n’est pas nécessairement permanent ; il peut, suivant les circonstances, être désigné spécialement en vue de telle ou telle affaire. Quelle que soit la part d’action qui lui appartient et qui lui est spécialement attribuée dans certains cas de mariage et de divorce, il semble que son autorité soit rarement décisive. C’est aux assemblées de la caste qu’appartient le dernier mot.

Elles sont plus ou moins étendues suivant les cas ; mais elles paraissent en général fonctionner comme représentant la caste entière et revêtues de la plénitude de son autorité. Convoquées par le chef, spontanément ou sur l’invitation de quelques membres, elles ont seules qualité pour trancher, de concert avec lui, dans les cas graves, tels que l’exclusion provisoire ou définitive, des points controversés du droit coutumier. Tous les hommes en âge de mener par eux-mêmes leurs affaires, y sont appelés. Le droit de se faire représenter dans la discussion et dans le vote n’est pas partout admis. Les questions se décident en somme à la majorité des votons ; mais, faute d’un pouvoir effectif de coercition, il arrive que des partis à peu près égaux, restant en présence ou opposant assemblée à assemblée, tiennent en suspens le point contesté. On imagine, sans que j’y insiste, combien tout ce petit droit parlementaire est indécis. Il suffit qu’où en entrevoie les lignes maîtresses. On y reconnaît les principaux traits qui reparaissent un peu partout dans la vie des tribus qui ne se sont point élevées encore à une véritable organisation politique. Et nous ne nous étonnerons pas que des assemblées et des usages analogues règnent parmi les populations nomades anâryennes aussi bien que chez les castes qui sont encadrées dans l’organisation brahmanique.

Le point intéressant, c’est la compétence de la caste ; c’est de ce côté que nous pouvons attendre les indications les plus instructives sur le vrai caractère de l’institution. Elle est à la fois civile, familiale, judiciaire. La caste intervient dans la plupart des circonstances solennelles qui intéressent uniquement à nos yeux la vie de famille. Je n’entends pas parler seulement des solennités qui réunissent la caste, ou au moins ses représentans principaux, à l’occasion des naissances, — quelquefois même à une certaine période de la grossesse, — des noces, des funérailles. Le cas n’est pourtant pas si futile qu’il pourrait paraître ; ces réunions n’ont pas le caractère de simples divertissemens facultatifs. Dans certaines classes, ou nous assure que leur omission entraîne jusqu’à l’exclusion de la caste. Mais je pense surtout à l’intervention de la caste dans les mariages ; son autorité en cette