Page:Revue des Deux Mondes - 1893 - tome 120.djvu/963

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

le degré d’intensité de la richesse privée accumulée dans les deux pays. Une cause occasionnelle de hausse chez nous a été l’intervention constante des fonds des caisses d’épargne dans les achats de rentes sur le marché. Aujourd’hui le Trésor allemand a besoin de ressources nouvelles pour couvrir l’accroissement des dépenses militaires ; il lui faut près de 100 millions par an ; le Reichstag est donc invité à voter des impôts supplémentaires atteignant la. Bourse, le tabac, le vin, etc.

Le Conseil d’administration de la Dette publique ottomane a publié récemment le compte rendu des opérations effectuées dans le dernier exercice 1892-93, et ce document est accompagné d’un substantiel rapport du président de ce Conseil, M. Vincent Caillard. Les renseignemens ainsi portés à la connaissance du public expliquent la grande hausse qui s’est produite depuis une année sur toutes les catégories de titres représentatifs de la dette turque.

On sait qu’en 1881 le Sultan a concédé à ses créanciers étrangers, en garantie de la dette ottomane convertie, un certain nombre de revenus spéciaux dont l’administration et la perception ont été remises à un Conseil international. Cet organisme a fonctionné avec une régularité parfaite depuis onze années, et le produit des revenus concédés a été s’accroissant sans cesse. Ces revenus sont les suivans : Tabacs (prélèvement fixe et part dans les bénéfices nets de la Régie), sel, spiritueux, timbre, pêcheries, soie, dime sur les tabacs. Il faut y ajouter deux redevances fixes sur les Douanes et sur le Tumbéki et l’annuité payée par la Bulgarie pour la Roumélie Orientale. Les créanciers étrangers ont droit en outre aux parts proportionnelles de l’ancienne dette turque, qui devraient être supportées par les États des Balkans et par la Grèce. Mais la diplomatie n’a pas encore déterminé les parts et jusqu’ici cette source de revenu est restée par conséquent stérile.

L’ensemble des revenus administrés par le Conseil donne un produit qui s’accroît régulièrement chaque année d’une centaine de mille livres turques en moyenne et dépasse aujourd’hui (tous frais d’exploitation déduits) 2 millions liv. t., somme suffisante pour payer ponctuellement l’intérêt promis et amortir par rachat une quantité importante de titres.

En 1892-93 les revenus nets totaux ont été de 2.184.545 liv. t. contre 2.066.571 l’année précédente, et il a été consacré à l’amortissement une somme de 670.558 liv. t., qui a servi à rembourser un capital nominal de 1.505.452 liv. t. Ces résultats sont dus à la fois à l’habile gestion du Conseil et à la fidélité du sultan aux engagemens pris en 1881. Cette fidélité lui a procuré le double avantage d’un relèvement très marqué du crédit de son empire et d’une mise en œuvre, déjà singulièrement féconde, des grandes ressources naturelles du pays. Le Conseil de la dette est devenu pour la Turquie une organisation analogue à la fois à la Caisse de la dette publique en Égypte et à l’administration des