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si connue aujourd’hui, qu’après 1814, lorsque l’édifice, à moitié détruit par l’incendie qu’allumèrent les Anglais, eut été rebâti et qu’une couche de peinture blanche eut effacé sur ses murs les traces de la fumée et des flammes. La maison présidentielle s’appela tout d’abord l’hôtel de l’Exécutif, the Executive Mansion. On avait songé à l’appellation de « Palais », mais le terme fut jugé trop ambitieux, trop aristocratique. On choisit, pour élever cette demeure, un emplacement plus rapproché du Polomac que celui du Capitole ; la première pierre fut posée avec solennité par Washington en 1792. Le projet de construction avait été mis au concours. Un architecte irlandais, James Hoban, établi à Charleston, où il édifiait de belles maisons sur la Batterie pour les planteurs sud-caroliniens et les riches négocians de la ville, fut avisé que son plan pour la maison présidentielle était, accepté. Il se rendit à Washington, reçut 500 dollars comme prix du concours et commença la construction. L’Executive Mansion fut la reproduction de l’hôtel du duc de Leinster à Dublin, bel édifice bâti dans le style des grandes villas italiennes de l’époque. Le goût n’était pas encore aux monumens d’habitation privée affectant l’aspect d’un temple, d’une cathédrale ou d’un château féodal.

Le gros œuvre était à peine achevé lorsque John Adams vint occuper le bâtiment dans l’automne de 1800. On voit dans les lettres de Mrs Adams combien on eut de peine à obtenir la quantité de bois nécessaire pour combattre les effets de l’humidité pénétrante et comment la femme du président étendait et faisait sécher le linge dans la grande « Salle de l’Est » destinée par Hoban aux réceptions, où s’entassent aujourd’hui, deux fois par an, les citoyens de l’Amérique pour l’exercice du droit sacré de broyer les mains de leur premier magistrat.

John Adams et Mrs Adams ne firent que passer à l’Executive Mansion, où ils étaient descendus pour quelques mois, comme dans une auberge incommode. Le 4 mars 1801, la présidence terminée, ils reprenaient la route du Massachusetts, laissant à Thomas Jefferson, le nouvel élu de la nation, le soin de faire au monde officiel et aux visiteurs étrangers les honneurs de la capitale et de la maison présidentielle.


II

Thomas Jefferson resta huit années l’hôte de cette maison et y prit en conséquence quelques habitudes.

Né en 1713, il avait cinquante-huit ans. Lorsque sa pensée se