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difficile à démêler. Leur étude n’a souvent conduit qu’à la confusion et à l’erreur. C’est ainsi que s’expliquent les fausses doctrines répandues sur la contagion à la suite de l’épidémie de 1832. La marche si évidente de l’épidémie de 1865 a détruit ces conclusions erronées.


X. — LES ÉPIDÉMIES NAVALES, LEURS CONSÉQUENCES.

En dehors de la grande épidémie de 1863, il y a eu un certain nombre de petites épidémies navales qui offrent un grand intérêt au point de vue de la route suivie par le choléra.

En 1881, le navire à vapeur anglais Columbian quittait Bombay le 19 juillet avec 660 passagers ou pèlerins (650 seulement sur la patente). Le choléra sévissait avec intensité à Bombay, où l’on compta 118 décès cholériques pendant le mois de juillet. Le Columbian perdit du choléra plusieurs de ses passagers dans la traversée de Bombay à Aden. Il importa la maladie à Aden, où le déchargement eut lieu le 1er août de grand matin. Le soir, on constatait un des premiers cas mortels sur l’un des déchargeurs. Il y eut 187 attaques et 151 morts. Les docteurs Lewis et Cunningham ont prétendu nier cette importation, qui a été au contraire nettement établie par les autorités anglaises d’Aden. « Et on s’étonne, dit M. Mahé, notre médecin sanitaire à Constantinople, qui a donné de tous ces faits une critique très judicieuse, de les voir combattre et rejeter les conclusions si précises des médecins militaires d’Aden, leurs collègues, et cela non seulement près d’un an après les événemens, mais encore fort loin du théâtre où ils ont été vérifiés avec une scrupuleuse attention par des observateurs consciencieux. »

En juillet 1882, partait également de Bombay le navire anglais Hesperia, qui contenait 24 pèlerins de plus que ceux portés sur la patente délivrée nette, bien que le choléra sévît à Bombay. Cette fraude d’inscription, qui rend impossible la vérification exacte du nombre des passagers morts pendant la traversée, ôte toute sa valeur à la patente, ainsi d’ailleurs que la déclaration de patente nette qui est presque toujours donnée dans les ports anglo-indiens alors même que le choléra y règne à l’état endémique.

L’Hesperia eut des cas de choléra avant d’arriver à Aden. Il en eut également dans ce port et fut envoyé à l’île de Camaran, qui sert de lieu de quarantaine dans la Mer-Rouge. Les trois quarts des passagers de l’Hesperia venaient de Boukara. Après trois mois de voyage, ils avaient pris le chemin de fer à Peschawer sur la frontière de l’Inde et s’étaient rendus, par Lahore et le nord-ouest de l’Inde, à Bombay. Plusieurs d’entre eux étaient allés jusqu’à