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employé avec grand avantage à l’alimentation du bétail et même des chevaux ; les grandes administrations de transport le faisaient entrer dans les rations, où il remplaçait une grande partie de l’avoine. En Angleterre, on en utilise aujourd’hui de très grandes quantités ; pendant les huit premiers mois de cette année, on en a introduit 1,200,000 tonnes valant environ 125 millions de francs ; pendant le seul mois d’août, la valeur du maïs introduit représentait 24 millions de francs. C’est également au maïs qu’a eu recours la Suisse, qui en a importé des quantités énormes, peut-être même exagérées. Pourra-t-on en France remplacer le maïs qui ne paraît pouvoir supporter les surtaxes de douane, par du riz, des débris de moulins, etc. ? C’est ce qu’il est difficile de savoir encore.

Si les graines amylacées font défaut, nous pouvons, et avec grand avantage, employer les tourteaux de graines oléagineuses. Les grandes huileries de Marseille ont réussi à conserver la libre entrée de leurs matières premières ; les graines d’Afrique continuent d’y affluer, et nous bénéficions actuellement de la mesure libérale qui a permis à notre commerce de s’approvisionner largement. Les tourteaux, c’est-à-dire les gâteaux qui restent sous les presses après que l’huile s’est écoulée des graines broyées, conviennent très bien pour compléter les pulpes que fournira le pays betteravier ou les maigres rations de paille de la région du centre ; les graines oléagineuses, comme les graines amylacées, sont, en effet, très riches en matières azotées, et naturellement les tourteaux le sont encore davantage, puisqu’ils représentent les graines privées de l’huile, dont le poids est presque la moitié de celui de la graine sèche.

En résumé, il faudra alimenter le bétail cet hiver avec de la paille, des feuilles, des brindilles, avec les résidus de la fabrication : du sucre, de l’alcool, de la bière, avec les issues des moulins, avec les marcs de pomme et de raisin, avec les ensilages, partout où il aura été possible d’en faire. Si on réussit à conserver les animaux domestiques, si les étables et les bergeries restent garnies jusqu’au printemps, ce sera grâce aux efforts qui auront été faits de toutes parts et qui méritent qu’on s’y arrête encore quelques instans.


VIII

Ces efforts ont été très grands, ils sont dus pour une bonne part à l’impulsion que l’administration de l’agriculture a su imprimer à tous ses services. Dès son arrivée au pouvoir, M. Viger a constitué une commission consultative permanente du conseil supérieur de l’agriculture, comprenant, outre les directeurs de son