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de percevoir 5 pour 100, sans bourse délier, sur les gisemens de leurs domaines, procès perpétuels entre les gens de Plancher, les abbés et le roi, manque de machines, moyens d’épuisement trop faibles pour mettre à sec les mines inondées, de sorte que les tentatives de reprise aux XVIIe et XVIIIe siècles n’eurent aucun succès ; dès 1760, les mines étaient pour toujours abandonnées[1].

La métallurgie comtoise faisait un peu meilleure figure. On distinguait alors les hauts fourneaux, massifs de constructions très solides où se fondait le minerai ; les forges, ateliers où l’on convertissait les fontes en gueuses, en bombes et en boulets pour l’armée ; les martinets, composés d’un foyer et de marteaux mis en mouvement par l’eau, fabriquant des outils d’usage commun, clous, instrumens de culture ; les fonderies. En 1698, on comptait une trentaine d’usines de ce genre, le nombre avait quadruplé en 1744. La forge de Fraisans (bailliage de Dole) produit 1,400 à 1,500 milliers de fer, alors que les autres ne dépassent pas 500 à 600 ; la plupart sont entre les mains des grands propriétaires du pays, magistrats, gentilshommes de robe ou d’épée, qui n’en tirent qu’un médiocre profit ; modicité du prix des fers, cherté des denrées, procès de délimitation entre les seigneurs et les communautés, au cours desquels tout reste en suspens, faute de combustible, privilèges de quelques-uns au détriment de tous, défaut de protection pour les petits maîtres de forges soumis aux mêmes droits que les plus importans, impôts exorbitans, nous retrouvons ici plusieurs des causes qui empêchèrent les usines de prospérer. Le gouvernement, le parlement redoutent un déboisement trop rapide qui eût nui au service des salines, de la marine royale, n’autorisent qu’avec peine l’ouverture de nouvelles forges ; et l’on entend l’écho de ces craintes dans les cahiers de 1789, le tiers-état du bailliage d’Aval va jusqu’à réclamer la fermeture des usines créées depuis quarante ans. Mais le mal le plus grave provient du manque d’eau et de bois ; dans les rapports des subdélégués, on retrouve sans cesse cette mention désolante : fermé la plus grande partie de l’année faute de bois et d’eau. Les forges de Conflandey au comte de Rosen, de Fallon au marquis de Raincourt, de Larians au marquis de Villette, de Mailleroncourt à M. de Mailleroncourt, languissent dans des chômages prolongés ; d’autres souffrent un peu moins : Athesans au marquis d’Aubigny,

  1. Thirria, Manuel à l’usage de l’habitant de la Haute-Saône, 1 vol. in-8o. — Bulletin de la Société d’agriculture de la Haute-Saône : l’industrie des mines et la métallurgie en Franche-Comté au XVIIIe siècle, par James Gordon S. Floyd. — Notice sur la Société des houillères de Ronchamp, 1889. — Les gens des campagnes croyaient reconnaître la maturité d’une mine aux feux follets qu’ils apercevaient à la surface.