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nous un retentissement considérable. Un homme politique français, M. Joseph Reinach, faisait paraître au même moment sous ce titre : la France et l’Italie devant l’histoire, une étude sur notre politique traditionnelle dans la péninsule, depuis les Valois jusqu’à Bonaparte, où il prouvait que nous n’avons jamais cessé de négocier et de combattre pour l’indépendance et l’unité de l’Italie. Que les Italiens aient conçu quelque mauvaise humeur de l’état imparfait où nous avons toujours laissé notre œuvre, on doit l’admettre, mais ils ne peuvent méconnaître notre bonne volonté. Aujourd’hui, ils envoient le prince de Naples assister à Metz aux manœuvres de l’armée allemande ; ce qui, étant donnée l’existence de la triplice, peut, aux yeux du Quirinal, sembler tout à fait nécessaire ; il n’en est pas moins vrai, pour un patriote clairvoyant, que les galons d’or sur les uniformes ne compensent pas le défaut de métal précieux dans les caisses.

Le mal financier n’est certes pas à son extrême ; le déficit de 50 millions, au budget de l’année passée, n’est pas de ceux qui ne se puissent combler ; l’Italie est revenue de plus loin et elle a toujours jusqu’ici fait honneur à ses engagemens. Mais sa situation économique n’est nullement florissante ; son industrie et son commerce sont dans le marasme. Placer des rentes ou des bons du trésor à l’étranger, comme le ministre des finances l’a fait ces derniers mois, n’est pas une solution, mais un expédient temporaire et qui deviendra vite fort dangereux. La loi des pensions, votée ce printemps, n’est elle-même qu’un palliatif insuffisant. Celle des banques, que le cabinet, après une laborieuse discussion qui a duré plus de trois mois dans les deux chambres, a enfin obtenue du parlement, n’aura pas de meilleurs résultats pratiques ; pour « sauver le crédit, » comme on l’a dit au palais Madama, on va sans doute se condamner au cours forcé pendant bien des années. Ces préoccupations financières ne sont pas les seules qui assaillent le gouvernement italien : l’instruction du procès de la banque romaine, qui n’a cessé de passionner l’opinion, lui ménage des scandales, dont les séances orageuses des derniers jours de la session n’ont été que le prélude.

Il ne faudrait pas croire que nous ayons, au palais Bourbon, le monopole des tumultes parlementaires. En Angleterre, la chambre des communes, la vénérable « mère des parlemens, » comme elle aime à s’appeler, a donné, depuis un mois, à ses enfans ou, si l’on veut, à ses cadets, de bien vilains exemples. Inquiet de la lenteur désespérante avec laquelle, grâce aux obstructionnistes de Westminster, marchait la seconde lecture du home-rule qui, depuis le commencement de mai jusqu’à la fin de juin, n’était parvenue qu’à l’article 5, sur quarante dont se composait alors la loi, M. Gladstone s’est résigné à appliquer aux unionistes les procédés qu’ils avaient inventés et inaugurés,