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du contrôle a également déterminé une partie des individus surveillés à établir leur domicile en dehors de Berlin.

Afin d’empêcher les conflits de compétence entre la police de Berlin et celle des localités voisines, conflits toujours funestes à l’efficacité du service, le ministre de l’intérieur a été autorisé à étendre le rayon de la police de Berlin, et l’on a détaché dans les villes voisines un certain nombre d’agens de la sûreté.

Les moyens accessoires que la police emploie sont les indicateurs ou vigilans, l’album photographique et la presse. On se sert des indicateurs pour rester en contact direct et permanent avec le monde du crime. Celui-ci n’est pas sans une certaine organisation en vertu de laquelle des malfaiteurs de profession, appartenant à la même catégorie, se connaissent entre eux, fréquentent les mêmes locaux, où ils s’entretiennent des incidens de leur existence, où ils préparent des crimes, cherchent des complices et des débouchés pour l’écoulement des produits du vol. La police a le plus grand intérêt à être tenue au courant des entreprises projetées ou exécutées ; ses agens officiels n’ont que difficilement accès dans les cercles du crime, et si habiles qu’ils soient à se masquer, à se grimer, ils ne tardent pas à être brûlés. Il faut donc chercher à recruter parmi les malfaiteurs eux-mêmes des dénonciateurs. C’est là une besogne très délicate pour les commissaires, et tous ne parviennent pas à savoir travailler avec les auxiliaires. Les sujets qui, par amour du lucre, trahissent leurs compagnons, inspirent de prime abord de la méfiance ; il arrive, en effet, que sciemment ils mettent sur une fausse piste ou qu’ils servent d’agens provocateurs. Leurs relations avec la sûreté ne les empêchent d’ailleurs pas de prendre part, le cas échéant, à des crimes. Toutes ces objections à leur emploi sont cependant insuffisantes ; le service de la sûreté serait désarmé, s’il lui était interdit de recourir aux vigilans. En effet, les coups les plus brillans et les plus heureux que tentent les voleurs sont ordinairement favorisés par la chance ; les auteurs en sont rarement surpris au moment de la perpétration. Il faut désespérer souvent de retrouver le produit du vol, car les malfaiteurs expérimentés se bornent à prendre l’argent comptant, les valeurs mobilières et les objets précieux qu’il est facile de fondre ou de dénaturer. Les indications que l’on reçoit des auxiliaires sont donc un point de départ pour les recherches, bien qu’il soit indispensable de les accueillir avec une extrême prudence et sous bénéfice d’inventaire.

Les auxiliaires sont payés en proportion de l’utilité de leurs renseignemens ; on ne peut les faire comparaître comme témoins dans un procès, et leur nom ne figure pas dans les rapports de police.