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À la différence des États-Unis, qui cherchent maintenant à restreindre l’immigration des travailleurs manuels et qui dans beaucoup d’États de l’Ouest entravent l’acquisition des terres par les étrangers sous la pression d’une démocratie rurale aveugle, le Mexique lait des conditions exceptionnellement favorables aux industriels, aux commerçans, aux spéculateurs étrangers. La législation civile ne fait point de différence entre les nationaux et les étrangers[1]. Comme le service militaire n’existe pas pour les gente decente, ceux-ci ne craignent pas de prendre la nationalité mexicaine ou au moins de la laisser prendre à leurs enfans.

Mais quelque aide que le Mexique reçoive du dehors, sa grande force consiste dans les idées nouvelles qui se font jour dans la classe des grands propriétaires et les poussent à faire valoir les richesses naturelles à peine exploitées dont ils sont les détenteurs. Elle réside aussi dans la vive aspiration au progrès qui travaille tous les hommes ayant reçu de l’instruction et qui, avec le temps, arrivera à constituer des classes moyennes solides, quand l’esprit industriel aura pris la place du goût malsain pour les révolutions politiques. Nous augurons favorablement surtout de la confiance que les Mexicains de tous les partis et de tous les rangs ont dans la prospérité future de leur patrie. C’est la première condition pour la réaliser. Ainsi que tous les peuples du Midi, ils s’assimilent promptement les élémens étrangers et comme, pour les raisons que nous avons dites, les grandes masses d’immigrans du vieux monde ne se porteront jamais au Mexique, il n’est pas à craindre que cette civilisation éminemment originale perde ses caractères distinctifs.


CLAUDIO JANNET.

  1. Voir un excellent travail de don Emilio Velasco sur la condition des étrangers au Mexique dans le Bulletin de la Société de législation comparée de 1892. Les études de droit international sont poussées fort loin. Les Elementos dederecho internacional privado de don Francisco Zavala (2e édition, Mexico, 1889) sont devenus classiques dans la science. Toutefois, la législation exige judicieusement que les sociétés faisant des opérations de banque, exécutant des travaux publics, exploitant des mines ou se livrant à des opérations de délimitation des terres publiques, se constituent conformément aux lois du pays et elle leur impose d’office la nationalité mexicaine.