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propres à remuer le sol, à le mélanger et à y provoquer une nitrification de printemps assez active pour que l’emploi des engrais azotés autres que le fumier de ferme devienne inutile.


VII

Il ne suffit pas de provoquer la nitrification au moment où elle est utile, il faut encore, sinon la restreindre à l’automne, au moment où la plupart des récoltes sont abattues, au moins empêcher les nitrates de disparaître. En moyenne, pendant les quatre dernières années, les pertes dues aux entraînemens par les eaux de drainage, que j’ai eu occasion de constater, ont été à l’hectare de 40 kil. 6 d’azote nitrique, ce qui correspond à 250 kilos de nitrate de soude, c’est-à-dire à une dépense comprise entre 60 et 70 francs par an, qui représente le loyer d’un grand nombre de terres passables de notre pays.

Ces pertes sont dues exclusivement à l’écoulement des eaux qui traversent le sol, quand il est nu, dépouillé de ses récoltes ; c’est là ce qui arrive dans toute notre région septentrionale, notamment dans la partie la plus riche et la plus prospère, celle du Nord-Est, où domine la culture de la betterave, qui revient tous les deux ans, alternant avec le blé. L’année où le sol porte des betteraves, les pertes sont minimes, la plante est arrachée tardivement, et son feuillage abondant couvre encore le sol pendant la plus grande partie du mois d’octobre, évaporant l’eau tombée, empêchant les drains de couler ; l’automne dernier, tandis qu’on recueillait la valeur de 6 millimètres d’eau de drainage échappée à une culture de betteraves, une terre qui avait porté du blé en laissait couler 35 millimètres. En moyenne, l’hectare de betterave n’a perdu que 6 kil. 6 d’azote nitrique, l’hectare de blé 54 kil. 6.

Pour éviter ces pertes, il faut empêcher l’écoulement de l’eau de la pluie par les drains ; rien n’est plus aisé : les végétaux sont de puissans appareils d’évaporation, aussi ne voit on l’eau traverser le sol qu’après la récolte ; tant que la terre est couverte, toute l’eau tombée est rejetée dans l’atmosphère par la transpiration végétale. Il ne faut donc pas qu’à l’automne la terre reste découverte, et aussitôt que la moisson est faite, il faut remplacer la récolte abattue par une culture dérobée. Presque toujours, immédiatement après la moisson, on fait passer sur les chaumes de blé ou d’avoine une charrue légère, un scarificateur qui entr’ouvre le sol ; c’est là ce qu’on appelle donner un labour de déchaumage ; cette opération est très utile. Par ce labour