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une véritable université, avec des cours de philosophie, de sciences et même de médecine[1] ; à Pathmos, dont les écoles et la bibliothèque, entretenues aux frais de la corporation des fourreurs de Constantinople, furent longtemps dirigées par Gérasime Byzantios, auteur d’un commentaire sur la grammaire de Théodore Gaza ; à Andrinople, où étudia le patriarche Cyrille ; à Jérusalem, où la culture grecque fut maintenue pendant quelque temps par la vigilance du patriarche Dosithée et de son successeur Chrysanthos ; à Bucharest, où l’hospodar Alexandre Ypsilanti institua des cours d’histoire, de géographie et de langues vivantes ; à Janina, dont l’ancienne académie fut comparée, à juste titre, bien qu’un peu pompeusement, par Néophyte Doucas « à un ruisseau capable d’étancher la soif de toute l’Hellade ; » enfin à Cydonie, en Asie-Mineure, ville libre et florissante, dont les quinze mille habitans furent, pendant près d’un siècle, affranchis, en fait, de la domination turque, et dont les renommés professeurs eurent pour élève un de nos compatriotes, Ambroise Firmin-Didot[2]. Cette organisation peu connue, et si admirable, de l’enseignement patriotique, donnait à Démétrius Cantemir, prince de Moldavie, presque le droit de dire en 1730, dans son Histoire de l’empire ottoman : « Ici, je prie le lecteur de ne pas regarder la Grèce moderne, comme font la plupart des chrétiens, avec un air de mépris ; bien loin d’être le siège de la. barbarie, on peut dire que, dans ce dernier siècle, elle a produit des génies comparables à ses anciens sages, et, pour ne point remonter plus haut, de nos jours on a vu trois patriarches, un de Constantinople et deux de Jérusalem, parvenir à une grande réputation, juste récompense de leur mérite[3]. »

Les écoles de la communauté grecque de Smyrne sont administrées par une éphorie dont les revenus sont constitués par des souscriptions, des dons et legs et des rétributions scolaires. Les statistiques les plus récentes leur attribuent 8,580 élèves, soit 4,044 garçons et 4,536 filles. Sept églises entretiennent, chacune, une école primaire gratuite de garçons. Ces écoles contiennent de 1,000 à 1,100 élèves. Plus de 600 jeunes filles, reçues, pour la plupart, gratuitement, fréquentent l’école de Sainte-Photine.

  1. Martin Crusius, professeur de littérature grecque et latine à Tubingue, donne de curieux renseignemens sur le Levant, dans un traité intitulé : Turco-Grœciœ libri octo. Bâle, 1584.
  2. Ambroise Fîrmin-Didot, Voyage dans le Levant, p. 381. Paris.
  3. Cantemir, Histoire de l’empire ottoman, traduite en français par M. de Joncquières ; Paris, 1743, t. II, p. 113. — Voyez le livre très documenté de M. G. Chassiotis : l’Instruction publique chez les Grecs depuis la prise de Constantinople par les Turcs jusqu’à nos jours. Paris ; Leroux, 1881.